Interdire les réseaux sociaux pour les personnes de moins de 15 ans, bonne idée ?

Dans ce billet, je vais reprendre la récente déclaration du Président de la république, à savoir « On doit interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans », propos déclaré sur France 2 en réaction à l’assassinat d’une surveillante au poignard par un élève à l’entrée de son collège.

S’il convient de condamner ce meurtre et d’éprouver de la compassion pour la victime et sa famille face à cet acte odieux, il convient aussi de s’interroger sur la mesure annoncée par Emmanuel Macron.

Interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans, pourquoi ?

Brièvement, on peut se demander pourquoi les interdire ? On peut imaginer que dans l’imaginaire collectif de nos dirigeants, ce sont les réseaux sociaux qui rendent violents. Leurs messages, les idées véhiculées, les propos tenus, parfois extrêmement violents il est vrai, seraient donc la cause de toute cette violence.

J’ai l’impression de lire un nouveau « c’est de la faute aux jeux vidéo », l’argument d’il y a quelques années – qui existe et revient encore – de nos politiciens, qui préfèrent rejeter la faute sur le divertissement plutôt que sur les réelles causes premières de la montée de la violence, bien plus complexes et profondes que ça.

Il est cependant vrai que les réseaux sociaux peuvent être violents, même un adulte peut rapidement voir des propos problématiques, dangereux, des incitations à la haine, etc. Pour autant, est-ce la faute du réseau social ou est-ce la faute des utilisateurs du réseau social en question ? Dit autrement, ne faudrait-il pas plus investir dans les obligations de modération de contenus que dans le fait de rendre inaccessible un réseau social ?

Prenons l’exemple de X, ex Twitter : jusqu’au rachat par Musk, le réseau n’était pas problématique. Sans dire qu’il était neutre, il fonctionnait correctement et remplissait ses fonctions. Ce sont les utilisateurs qui sont devenus problématiques, les propos des utilisateurs qui sont devenus plus incisifs, plus agressifs, la montée de la violence des propos, etc. La situation est différente depuis le rachat par Musk car le réseau n’est plus du tout neutre et met en avant des idées d’extrême droite, contre les minorités, les personnes racisées, les personnes de la communauté LGBTQIA+, etc. Comprenez par là que même s’il n’y avait plus aucun utilisateur de X, il serait problématique.

Résumons notre premier point : un réseau social est, de base du moins, neutre. Il n’est ni bien, ni mal, ni gentil, ni méchant. Il n’est que le reflet des personnes que nous suivons, des contenus que nous partageons, des interactions que nous avons. Les algorithmes ne sont pas neutres et reflètent les orientations des décideurs de ces plateformes et ces mécaniques mériteraient d’être plus transparentes afin, justement, de pouvoir les contrôler et d’enrayer les mécaniques qui poussent à l’expression de la violence et donc, à la lecture ou au visionnage de contenus violents sur les réseaux.

Revenons au propos initial : bloquer les réseaux sociaux aux moins de 15 ans.

Comment on fait ça ?

D’un point de vue technique, il existe beaucoup de solutions. Elles ont toutes des avantages et des inconvénients et un certain taux d’efficacité, qui varie d’une solution à l’autre

On pourrait mettre en place une solution déclarative : lors de l’inscription d’une personne sur un réseau social, il serait possible de mettre en place un contrôle d’identité en fournissant, par exemple, un scan de la Carte Nationale d’Identité (CNI dans la suite du texte). La fourniture de cette CNI pourrait être à la main du réseau social ou à la main d’un intermédiaire de confiance, un peu à la façon de France Connect qui est un intermédiaire de confiance fournissant des identités pour des sites étatiques.

Premier problème

Les réseaux sociaux n’ont pas à vérifier les identités de leurs inscrits et il ne faudrait pas leur transmettre des documents d’identité, ces derniers étant relativement sensibles, afin de se prémunir de toute fuite, faille ou exploitation de données à d’autres usages que celui de la vérification de l’âge.

Second problème

Imposer un fournisseur d’identité tiers, c’est faire peser toute la procédure de vérification d’identité sur une seule entité, donc c’est créer un point d’intérêt certain pour les pirates. En sécurité informatique on pourrait parler de SPOF, pour Single Point Of Failure. S’il tombe, tout tombe avec. C’est aussi confier beaucoup trop de données à l’état, car ce fournisseur serait certainement étatique et cela poserait problème dans le respect de la vie privée, un état qui sait tout de vous en ligne, surtout dans cette période ou le fascisme revient en force, c’est une très mauvaise idée.

Troisième problème

C’est un problème qui va revenir de nombreuses fois : ces mesures ne peuvent s’appliquer qu’aux personnes concernées par la loi française. Dès lors, utiliser un VPN pour se géolocaliser ailleurs permet de contourner le problème. La mesure est donc peu efficace dès lors qu’il est aisé de contourner les restrictions et il serait idiot de penser que les ados ne savent pas s’en servir, clairement : ils savent très bien s’en servir.

Quatrième problème

Il est d’ordre social cette fois : de nombreux ados sont sur les réseaux sociaux pour discuter avec leurs amis, pour consommer des contenus de leurs créateurs et créatrices de contenus préféré.e.s et ils ne font rien de mal. Leur interdire les réseaux sociaux viendrait à isoler ceux qui sont déjà isolés et qui s’ouvrent sur le monde grâce à Internet. La seule conséquence sociale qui peut sortir d’un tel projet c’est que ceux qui sont isolés seront encore plus isolés.

De plus, interdire les réseaux sociaux à ces personnes, c’est prendre le risque qu’ils aillent ailleurs, sur d’autres réseaux sociaux qui viendraient à arriver et qui n’auraient pas encore décidé de mettre en place des barrières. Dès lors, ils seront plus « cachés », sur des réseaux peut-être moins fiables, avec moins de protection.

On résume donc : pour être fiable, il faudrait une mesure particulièrement intrusive d’une part, un tiers de confiance d’autre part, pour un résultat qui serait sans doute mitigé voire nul. Le tout en faisant prendre des risques aux ados, encore apprentis sur Internet parfois. Bref, c’est une fausse bonne idée que de trouver une réponse technique à un problème d’éducation.

Mettre une restriction par adresse IP ?

On pourrait aussi mettre en place une restriction via adresse IP pour les réseaux sociaux : dès lors qu’une IP française se connecte à un réseau social, on lui demande une vérification d’âge.

Techniquement, c’est faisable côté opérateurs mais ça nécessiterait de toucher à la neutralité du réseau et ça concernerait, dès lors, toute personne ayant une IP française, y compris les personnes en visite sur le territoire, qui, elles, n’ont pas rencontré ça dans leurs pays d’origine.

La même problématique des VPN se pose : si le VPN sort avec une IP qui n’est pas française, alors la restriction est contournée, c’est aussi simple que ça.

On rajoute à cela un nouveau problème

Pour contourner les restrictions, il est fort probable que les personnes trouvent des outils disponibles sur Internet pour contourner les restrictions… et rien ne dit que ces outils soient des outils sûrs. Il y a pléthore de VPN, tous ne sont pas bons, tous ne sont pas à utiliser car certains sont des arnaques absolues qui ne font que piller les données de leurs utilisateurs et utilisatrices.

Donc, aux problèmes précédents, on rajoute un potentiel problème de sécurité des terminaux et des données des utilisateurs.

Troisième solution : de la reconnaissance faciale en direct.

Une autre solution serait envisageable : celle de contrôler en direct que la personne qui s’inscrit est bien une personne adulte, via la caméra du téléphone ou du PC. Ce procédé existe sur l’identité numérique fournie par La Poste, par exemple. On pourrait imaginer qu’un fournisseur d’identité comme La Poste soit intermédiaire pour reconnaitre les individus, leur créer une identité numérique, afin de leur permettre de prouver leur âge sur un réseau social.

On pourrait aussi décider que la charge de cette reconnaissance soit gérée par les fournisseurs des réseaux sociaux… auquel cas, on viendrait à leur confier des millions de données biométriques… autant dire que c’est une très mauvaise idée et qu’il est fort probable que cette dernière soit contraire aux principes de protection des données tels que présentés dans le RGPD, l’usage des données biométriques étant assez bien encadré.

Je ne parle même pas ici des problématiques liées à la reconnaissance faciale sur des caméras personnelles, pas toujours de très bonne qualité. Il serait aisément possible de contourner techniquement ces barrières. Je ne parle pas non plus des faux positifs, ces personnes de 13 ans qui en font 20 et de ceux de 20 qui en font 14, il y aurait forcément des erreurs et, dès lors, un préjudice pour les personnes concernées.

Résumons, à nouveau, tout ce que nous venons de dire, en une seule phrase : la réponse technique et uniquement technique est vouée à échouer.

La réponse technique n’est pas une réponse magique, elle ne solutionne pas tout, surtout lorsque le problème est davantage un problème de société et d’éducation qu’un problème technique. S’il peut exister une solution technique, elle doit forcément être secondaire d’une part, et adossée à une autre solution d’autre part. La réelle solution fonctionnelle et durable est l’éducation numérique, l’éducation à ces réseaux, l’explication des principes de fonctionnement desdits réseaux et, éventuellement, une réponse technique adaptée.

A mes yeux, la seule protection qui puisse donner satisfaction, c’est un contrôle parental et des explications prodiguées par l’éducation nationale. De la même manière qu’on apprend la science physique, on pourrait – et on devrait – donner des cours sur les réseaux sociaux et le numérique dès les petites classes. J’ai déjà vu des cours ainsi, mais à l’université, c’est beaucoup trop tard.

Un contrôle parental n’oblige pas les fournisseurs des réseaux sociaux et les opérateurs de réseau à jouer aux apprentis sorciers dans leurs tuyaux. Il permet de donner le pouvoir à l’autorité parentale et de contrôler finement qui accède à quoi, quand et comment. Il doit être protégé correctement, il doit être configuré correctement, il ne doit pas pouvoir être désactivé aisément, certes, mais tout ceci est déjà possible.

Je suis un vieux con des Internets et ça fait plus de 20 ans que d’autres et moi nous nous efforçons d’expliquer qu’une réponse technique à un problème de société est toujours une mauvaise réponse, il serait peut-être temps d’écouter les expert.e.s du sujet et d’éviter les lois inefficaces qui posent plus de problèmes que de solutions.

Un monde sans neutralité du net

Ce billet s’adresses à celleux qui se disent « La neutralité du net ? Rien à foutre. », ainsi qu’a celleux qui ne comprennent pas forcément, par manque de temps, de moyens ou de savoirs, les implications concrètes d’une absence de neutralité du net. Continuer la lecture de Un monde sans neutralité du net

Un exemple d’atteinte au principe de neutralité ? Verizon, Yahoo! et Tumblr

2014. Il est loin le temps où Tumblr était un défenseur de la Neutralité du Net, aux côtés d’Amazon, de Kickstarter, de Vimeo, Reddit, de Netflix et de bien d’autres. Il y a quelques jours, Verizon, un fournisseur d’Internet et de Mobile côté Etats-Unis, finalisait le rachat de Yahoo! et donc, du service Tumblr.

Dans la foulée, la société déclarait que les comptes crées via des adresses e-mail AT&T, un de ses concurrents, seraient purement et simplement dégagés des services liés à Yahoo!.

Une jolie atteinte au principe de neutralité ? Analyse. Continuer la lecture de Un exemple d’atteinte au principe de neutralité ? Verizon, Yahoo! et Tumblr

Censure : a quel jeu joue Facebook ?

Il y a quelques jours, une nouvelle venait assombrir le paysage de la « liberté d’expression » sur Facebook, comprenez par-là, la liberté d’expression selon Facebook qui est une lointaine cousine de la véritable liberté d’expression. Retour sur cette affaire. Continuer la lecture de Censure : a quel jeu joue Facebook ?

Il y a pire que la censure. #PJLRenseigment

Le projet de loi sur le renseignement sera examiné dans le courant du mois d’avril. Jusque à cette date, il ne sera que générateur de questions et d’inquiétudes, parfaitement soulignées par de nombreux acteurs.

Pour rappel, voici une liste à jour des personnes, ONG ou associations et autres qui se posent des questions sur le projet de loi.

Ce matin, une conférence commune à nombre de ces entités avait lieu dans les locaux de la Quadrature du Net et ces dernières se sont inquiéteés, sans doute à juste titre, de la très dangereuse orientation que prend le gouvernement : la surveillance massive et la capacité que s’octroie l’Etat à pouvoir surveiller quasiment n’importe qui.

Si le projet de loi est nécessaire afin de permettre aux agences de renseignement d’être plus rapides et efficaces pour lutter contre « le mal » – expression volontairement mise en avant pour caricaturer la vision très binaire de l’Etat sur le sujet – qui ronge notre pays, il n’en reste pas moins qu’il ne prend pas en compte les effets de bord de tout ceci, les « dommages collatéraux » comme on dit.

Il s’avère qu’un de ces effets de bord, non pris en compte par notre gouvernement, est bien pire que les risques de détournement de la loi et de censure qui vienent menacer nos libertés individuelles. La France glisse vers quelque chose de bien pire que la simple censure.

La censure est subie, elle n’est pas le fait de notre volonté, mais de celle des censeurs.

La censure est une limitation arbitraire, par un gouvernement, de notre capacité à nous exprimer.

En l’état, notre gouvernement va aller au-delà de la simple censure : en instaurant un régime de « sur-surveillance », en étant en capacité de faire de l’interception massive de l’ensemble des données des citoyens – même s’il ne le fait pas, il sera en capacité de le faire – et en prenant le parti parfaitement volontaire de se passer du pouvoir judiciaire, nous basculerons irrémédiablement dans un régime qui favorisera l’autocensure.

Le gouvernement fait le choix de se passer du pouvoir judiciaire. Ce n’est pas une erreur ou un oubli, c’est un acte conscient, longuement réfléchi, le projet de loi sur le renseignement ne s’est pas écrit en trois heures sur un coin de table.

Ce choix vient déséquilibrer la balance entre les trois pouvoirs, comme j’en ai déjà parlé récemment lorsque j’ai commencé à m’interroger sur les bases d’une dictature, que j’ai l’impression de voir arriver.

Le gouvernement va favoriser l’autocensure…

et c’est bien pire que la censure, cette dernière fonctionnant à postériori.

L’autocensure vient de nous, elle représente une manifestation du changement de comportement, face à un régime déséquilibré, totalitaire.

Elle est plus dangereuse car elle est invisible et majoritairement inconsciente.

Saviez-vous, par exemple, que plus il y a de caméras de surveillance qui vous suivent, plus votre comportement change ?

La surveillance modifie notre capacité d’autorégulation : lorsque quelqu’un vous observe – un agent de police par exemple – vous le savez, vous le voyez.

La vidéosurveillance entraine l’autocensure parce qu’elle crée l’incertitude : la caméra est là mais on ne sait pas si l’on est observé ou non, on ne peut que supposer qu’on l’est et inconsciemment, notre comportement s’en trouve modifié.

La vidéosurveillance est « là sans être là »

Nous ne la remarquons pas toujours, on oublie qu’elle est là car elle n’est pas en face de nous et, de plus en plus, elles est invisible car « intégrée de la meilleure manière à l’espace urbain », comprenez par-là qu’il faut rendre les caméras invisibles pour donner l’illusion qu’elles ne sont pas là, libre à vous de croire que c’est pour votre bien ou pour pouvoir vous surveiller sans en être conscient, cela dépend de la sensibilité de chacun.

Avec le projet de loi sur le renseignement, ce risque d’autocensure grandit un peu plus : tout système de surveillance massif, tout système qui est en capacité de capter vos données numérique, entraine le doute.

Vous pouvez supposer que par défaut, vous n’êtes pas sous surveillance, mais vous ne pouvez pas réellement le confirmer. Vous ne pouvez que supposer que vous ne l’êtes pas. Ou que vous l’êtes. Comme le système de vidéo surveillance, ce dispositif est invisible, nous l’oublions donc assez rapidement mais inconsciemment, nous savons qu’il est là.

Ce point est renforcé par l’absence du pouvoir judiciaire : je n’ai pas la possibilité de saisir le garant de mes libertés individuelles si j’ai un doute, je ne peux que saisir une autorité administrative – la CNCTR, qui ressemble plus à un justificatif – reliée au pouvoir exécutif. Mon potentiel surveillant est aussi mon potentiel protecteur, situation très ambiguë vous en conviendrez.

L’autocensure a de pis qu’elle s’inscrit dans le très long terme. Nous sommes conscients de cette autocensure mais vivons dedans donc l’oublions un peu, la génération d’après encore plus car ils ne sont pas nés dedans, c’est donc naturel pour eux et ce qui est naturel ne représente pas de danger. Il suffit de voir les réactions des générations les plus récentes, qui ne voient pas, pour beaucoup, de problèmes dans la vidéo surveillance.

Je m’interroge à nouveau… est-ce que le gouvernement a réalisé une étude – sérieuse, cela va sans dire – sur l’impact de la surveillance sur les comportements de la population ?

Je ne suis pas le seul à m’interroger, la Quadrature du Net, tout comme Amnesty, se posaient la même question ce matin, lors de la « conférence commune ».

Avec …

  • les experts et associations dont la Ligue des Droits de l’Homme qui parlent de surveillance généralisée,
  • les similitudes inquiétantes entre le projet de loi sur le renseignement et la loi FISA, au cœur des scandales liés à la NSA, qui a par ailleurs très largement outrepassé ses droits.
  • Reporter Sans Frontières qui s’inquiète des débordements des services de renseignement,
  • le Syndicat de la Magistrature, qui maîtrise bien mieux un texte de loi que moi et qui s’inquiète quand-même du texte
  • Un gouvernement qui ne sait pas ce que va devenir ce projet de loi sur le plan pratique
  • Des parlementaires qui reconnaissent ne pas maîtriser les aspects techniques de la loi sur le renseignement,
  • l’absence d’étude et de statistiques sérieuses sur l’intérêt de la surveillance,
  • l’absence de garde-fous pour relever les dérives des agences de renseignement,
  • le fait que le juge soit exclu du projet de loi, de manière volontaire,
  • le fait que nous soyons plus ou moins tous suspects, donc pas innocents par défaut,
  • le fait que protéger sa vie privée pourra être interprété comme un acte suspect,

je vous avoue que je suis perplexe pour la suite des évènements, il faudra être très présent lors de l’ouverture des débats et faire très attention à tout ce qui va se passer, se dire et être pris en compte.

Sans quoi, nous arriverons à cette autocensure qui m’inquiète tant.

Canal plus en veut plus que les autres.

Présent au festival de Cannes, Canal Plus vient de se faire remarquer, lors d’un colloque organisé par la SACD.

En effet, le directeur général de la chaine Canal+, M. Belmer, a déclaré : « Une concurrence déséquilibrée est en train de s’établir en termes fiscaux, en termes d’obligations, en terme de masse et d’investissements »

Ces propos visent directement Netflix, la grosse bête noire de nos bons vieux systèmes de diffusion de contenu français, comme Canal.

Pour le directeur général de la chaine, « il faut créer des avantages compétitifs pour des acteurs comme nous » …

Traduction : nous sommes un groupe français, il ne faut pas que l’autre méchant qui n’est pas français vienne nous piquer notre parc de clients.

Enfin, il déclarera « il faudrait qu’un acteur comme nous soit favorisé pour accéder aux fils du téléphone. Il faudrait que ce soit plus facile pour nous d’amener nos programmes avec une bonne qualité de débit. »

Alerte, atteinte aux principes de la neutralité du Net détectée.

Pour rappel, un des principes de la neutralité du Net précise qu’un paquet de données ne doit pas être favorisé par rapport à un autre paquet, d’où qu’il vienne et où qu’il aille.

Manifestement, Canal+ est donc contre cette neutralité et ce même si le directeur général déclare « nous ne sommes pas contre la neutralité du net ».

Dans les faits, Canal+ souhaite faire prioriser son trafic afin d’être en capacité de fournir une bonne qualité vidéo, le groupe songe donc à un deal avec les fournisseurs d’accès, afin d’être priorisé.

Seulement voilà, Canal+ sait que ça, c’est un arrangement, quelque chose qu’un F.A.I n’est pas obligé d’accepter. Un F.A.I peut très bien refuser cet accord, demander plus d’argent, ne pas avoir un niveau assez satisfaisant pour Canal … et c’est pour ça que Canal souhaite passer par la voie législative pour contraindre les F.A.I à le faire.

Alerte, cette idée et l’éventuelle proposition de loi derrière sont dangereuses.

Dangereuses pour deux raisons. La première concerne évidemment la situation de Canal Plus. Favoriser un acteur comme ça est une atteinte claire, selon moi, aux principes de la Neutralité du Net.

La seconde raison, c’est ce qui pourrait découler de ce genre de loi ou de demandes. Une énième fois, légiférer dans ce sens ne peut qu’entrainer d’autres acteurs à demander la même chose, à étendre les groupes qui pourront utiliser cette loi et, au final, dégommer encore un peu plus ces principes de neutralité qui font du Net ce qu’il est aujourd’hui.

C’est donc, toujours selon moi, une idée qui doit rester une idée.

Dernier petit constat : les acteurs français ne s’adaptent toujours pas, ils préfèrent venir pleurer et crier au scandale que de changer leurs méthodes, c’est dommage.

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