A mon tour de faire un retour sur mes différentes contributions au projet de loi relatif au numérique ou, comme il est présenté sur le site de contribution « République Numérique », le « projet de loi pour une République numérique ».
L’inscription
Premièrement, il faut s’inscrire afin de pouvoir contribuer. Cela me semble assez normal mais les interconnexions possibles sont extrêmement limitées. Il est ainsi possible de s’inscrire avec son compte Facebook, son compte Google ou directement sur la plateforme, mais pas plus.
Pour un projet qui souhaite adapter la république au numérique, c’est déjà mal parti. Le système est extrêmement centralisé et repose sur au moins deux acteurs américains omniprésents, le G et le F de GAFA.
Je suis resté pantois quant à la question « Vous êtes ». Je ne sais pas pourquoi cette question est posée : est-ce à des fins statistiques ? Est-ce que la parole d’un citoyen a un poids différent de celui d’une organisation à but non lucratif, qui a lui-même un poids différent de celui d’une organisation à but lucratif… ?
Une petite explication sur ce point me semble nécessaire.
Blanc ou noir.
L’ensemble est assez fluide, on s’adapte très vite au fonctionnement de la plateforme, c’est assez agréable…
…Mais c’est peut-être le seul point positif dans tout ça. Le site force l’utilisateur à être binaire, à faire un choix.
Un utilisateur peut être pour, contre ou avoir un avis mitigé sur un article mais, s’il souhaite commenter, il devra obligatoirement être pour ou contre le texte. Il n’est pas possible d’être « pour avec réserves », d’avoir un avis « mitigé », de ne pas avoir d’avis tout en souhaitant commenter pour poser une question par exemple, d’être « contre sauf si… »
Exemple : un article est proposé sur la « Neutralité du Net » et cet article ne me convient pas, pour autant je suis content de voir cette proposition, je ne suis donc ni pour, ni contre. J’ai souhaité commenter mais il me faut forcément être pour ou contre l’ensemble de l’article… je n’ai donc pas participé à ce point.
Certaines propositions d’amendements sont excellentes, d’autres sont clairement à revoir et d’autres n’ont pas spécialement leur place au sein de ce projet mais, c’est ça aussi, la démocratie, tout le monde peut s’exprimer.
Sur le fond.
Je m’adresse plus particulièrement aux amis et copains qui ont bataillé lors de la loi relative au renseignement et qui sont, j’imagine, dans le même état que moi : fatigué.e.s de se battre contre des murs, ayant l’impression de brasser du vent et un peu démotivé.e.s.
Il faut contribuer, participer, donner son avis, son opinion, proposer des amendements, s’impliquer. Ça demande un effort supplémentaire mais il faut le faire. Nous sommes les premiers à hurler lorsque personne ne nous écoute. Ici, nous avons un espace où nous pouvons nous exprimer, utilisons-le.
Je n’ai pas envie de lire, d’ici quelques semaines « les gens hurlent de ne pas être écoutés et lorsque nous leur permettons de s’exprimer, ils n’utilisent pas ce pouvoir. », hors de question pour moi de leur donner des armes pour nous taper dessus, ils le font déjà bien assez sans notre aide.
Est-ce que cela va changer réellement quelque chose ?
Non. La réponse est simple, sans aucun détour, non.
Cette loi arrive après la bataille, après la loi relative au renseignement en particulier. Elle ne nous offre que des ruines, des miettes, pour tenter de nous contenter et de nous « apprivoiser » après nous avoir piétinés.
Pourquoi ne pas avoir mis une contribution en place sur d’autres projets de loi, avant ?
Pourquoi nous écouter seulement maintenant, en allant jusqu’à sacraliser des choses comme le secret des correspondances, alors que la loi sur le renseignement a littéralement détruit ce droit ?
Les meilleurs amendements, les meilleures propositions, ne seront pas retenues. Pourquoi ? Ne vous en faites pas, le gouvernement trouvera bien une justification pour les mettre à la poubelle.
Il se félicitera en même temps d’avoir expérimenté ce type de « démocratie directe ».
Bref, une plateforme où je dois forcément être pour ou contre, avec un texte qui ne représente que quelques miettes du numérique, offertes histoire de faire croire à une réelle ouverture du gouvernement, après le passage en force d’un bon nombre de projets liberticides….
Désolé, la République numérique, ce n’est pas pour maintenant.