Je cherchais un sujet à aborder pour mon 1er article sur ce blog, je crois que c’est chose faite 🙂
Tout à commencé hier, sur Twitter, avec 2 twittos (un twittos, c’est un peu de l’argot de twitter addict, c’est un utilisateur de Twitter). Ces deux twittos et moi-même sommes adeptes des débats nocturnes, des moments « on va faire bouger les choses, elles doivent changer, on doit agir », un peu comme des gosses les yeux pleins d’espoirs et de volonté pour changer le monde.
Au fil du débat, nous en sommes arrivés à parler d’un art pratiqué par énormément de monde, du chef d’entreprise au politique en passant par vous et moi. Cet Art, c’est celui de la langue de bois.
L’Art de la langue de bois, c’est la capacité à « détourner la réalité par des mots. C’est une forme d’expression qui, notamment en matière politique, vise à dissimuler une incompétence ou une réticence à aborder un sujet en proclamant des banalités abstraites, pompeuses, ou qui font appel d’avantage aux sentiments qu’aux faits. » [1]
L’article fait donc un petit focus sur cet Art au travers de la politique. Commençons avec des exemples :
« J’ai depuis longtemps (ai-je besoin de vous le rappeler ?) défendu l’idée que le particularisme dû à notre histoire unique oblige à la prise en compte encore plus effective d’un projet porteur de véritables espoirs, notamment pour les plus démunis. »
« Par ailleurs, c’est en toute connaissance de cause que je peux affirmer aujourd’hui que la volonté farouche de sortir notre pays de la crise interpelle le citoyen que je suis et nous oblige tous à aller de l’avant dans la voie de solutions rapides correspondant aux grands axes sociaux prioritaires. »
« Mesdames, Messieurs, l’aspiration plus que légitime de chacun au progrès social entraîne une mission somme toute des plus exaltantes pour moi : l’élaboration d’une valorisation sans concession de nos caractères spécifiques. »
Qui a dit ça ? Qui est à l’origine de ces 3 phrases ?
Manifestement, vu la façon dont sont tournées les phrases, leur construction, les sujets qu’elles abordent, on peut imaginer que ces 3 phrases sont celles d’une personnalité politique… pourtant, la réalité est tout autre.
Ces phrases viennent d’un générateur de phrases « langue de bois » [2], un site web donc, tout ce qu’il y à de plus banal. Comme on dit, ça calme hein ?
Et oui, vous découvrez que le discours d’une énorme part (si ce n’est pas totalité) de nos personnalités politiques est construit de la même manière…et c’est ainsi que tout s’effondre.
Nos politiques sont rompus à l’exercice, leur expérience et leur chargé de com. faisant le travail pour un bon discours « langue de bois »
Petite analyse d’une phrase que personne n’a jamais dite, puisqu’elle est également issue du générateur :
« Et ce n’est certainement pas vous, mes chers compatriotes, qui me contredirez si je vous dis que le particularisme dû à notre histoire unique interpelle le citoyen que je suis et nous oblige tous à aller de l’avant dans la voie d’un processus allant vers plus d’égalité. »
« Et ce n’est certainement pas vous, » : c’est un peu comme si le politique disait : « si tu dis le contraire, bah t’es bien con », c’est inconscient mais ça fonctionne, on se dit que c’est un politique, qu’il sait ce qu’il dit, donc ne peut donc penser le contraire.
« , mes chers compatriotes, » : on fait appel à l’affect, le sentiment d’appartenance à une patrie, une nation. Rien de concret, rien de factuel, mais on cherche à éveiller un sentiment d’appartenance chez le citoyen. Comment, dès lors, penser différemment d’une patrie entière…
« , qui me contredirez si je vous dis que le particularisme dû à notre histoire unique » : juste un passage de blabla, il en faut pour maîtriser la langue de bois. On fait appel à une particularité x ou y, en l’occurrence, notre passé, notre histoire. C’est volontairement vague pour que tout le monde puisse penser à quelque chose qu’il identifiera en lien avec la phrase. Il aurait pu parler de la seconde guerre mondiale ou que sais-je encore, mais pour bien parler la langue de bois, il faut parler d’une banalité, d’une généralité, quelque chose ou chacun est capable soit de s’identifier, soit de lier une pensée, une idée, à la phrase dont il est question.
« le citoyen que je suis » : elle est belle celle là : nous sommes tous citoyens, en disant cela, le politique fait d’une phrase une généralité, je vous fais le schéma de la pensée en question :
Je pense une idée x = je vous invite à ne pas me contredire = je pense cela en étant citoyen = tout les citoyens devraient donc penser la même chose.
Nos politiques auraient pu remplacer Léonardo Di Caprio dans Inception, à coup sur.
« nous oblige tous à aller de l’avant » : comprenez que le politique n’est qu’un messager, il fait état d’un constat. Il aurait pu rajouter une citation (nb : le fait d’ajouter une citation d’un grand homme appuie et confirme les dires : comment penser différemment d’un Einstein, par exemple)
« d’un processus allant vers plus d’égalité » : quel processus ? Quel est le rapport entre l’histoire, le passé, l’effort de chacun et … l’égalité ? Et puis, l’égalité de quoi ? De qui ? L’égalité des chances, l’égalité hommes femmes ? L’égalité du pouvoir d’achat par rapport aux autres pays de l’UE ?
Vous l’aurez compris, ici, le politique ne précise pas l’égalité dont il est question, tout simplement parce qu’il ne veut pas, parce que cette phrase suffit à faire passer n’importe quel projet… par exemple, rajoutez à la fin de la phrase :
Comme vous le savez tous, la France est le pays des droits d’auteur, notre histoire nous donne raison, mes chers compatriotes. Cet effort nécessaire, nous le porterons pour vous, au travers de la loi HADOPI, plus égalitaire, plus adaptée, …
Ou…
Comme vous le savez, l’insécurité et les difficultés de chacun sont une nouvelle chose dans notre histoire. Ce n’est pas vous qui me contredirez si je vous dis qu’il est nécessaire d’effectuer une transformation en profondeur pour que rien ne change, c’est pourquoi nous proposerons la loi LOPPSI, afin que le problème de l’insécurité et de l’inégalité des chances ne soit plus qu’un souvenir.
Alors, toujours pas convaincu que ce que les politiques nous disent n’est que du vent ?
Comprenez toujours un double sens dans le discours d’un politique. Ce qui est intéressant, ce n’est pas ce qu’il dit, pas ce qu’il met en valeur, pas les réponses qu’il donne…mais celles qu’il ne donne pas, les questions qu’il esquive, c’est ce qu’il ne dit pas.
Pour finir cet article, petite vidéo : [youtube=http://www.youtube.com/watch?v=oNJo-E4MEk8]