Un an.

« – Fais attention à toi, vraiment, ça commence aussi à éclater là-bas. »
« – Ne t’en fais pas, ça ira, je suis loin des conflits, et puis c’est chez moi. »

Se furent ses dernières paroles avant de partir.

Un an aujourd’hui, comme le temps passe vite. Si moi je suis encore là pour en parler, elle elle l’est déjà moins. Ou peut-être pas. Je ne sais pas en fait.

Qu’est-elle devenue ? Est-elle toujours vivante ? Est-elle rentrée sans que nous reprenions contact ? Tant de questions sans réponses.

Peut-être est-elle en train de lire ces lignes à l’instant ou je parle ?

Je m’en souviens encore, c’était dans la nuit du 18 au 19 : un écran, une fenêtre IRC et beaucoup de café. Qui pouvait réellement savoir ce qui allait se passer ?

« – Tu as vu, l’Égypte, ça s’enflamme vraiment cette fois-ci ? »
« – Oui, j’ai vu. »
« – Ça va ? »
« – Non »
« – Pourquoi ? »
« – Parce que c’est mon pays, que ma famille vis la bas, que j’ai peur pour eux. »
« – Tu ne m’en as jamais parlé, même si nous ne causons pas ensemble depuis longtemps, t’en avais jamais parlé avant »
« – Je sais, je parle pas de tout tu sais. »
« – Oui »
« – Je sais pas quoi faire, j’ai peur. »

Et moi, bien intelligent de répondre : « – hormis penser à eux, d’où tu es, tu ne pourras rien faire physiquement. »

« – Je vais rentrer. »
« – Pardon ? »
« – Je peux pas rester pendant qu’ils se cassent le cul et se font matraquer la gueule »
« – … désolé, oui. »
« – Puis il y IRC et j’ai trouvé ton facebook »
« – Non, pas IRC, pas comme ça en tout cas, ça sera pas sur pour toi, le gouvernement va (si c’est pas déjà le cas) écouter Internet, Mubarak est présenté comme un danger et pour facebook, le traffic est ou sera détourné pour faire taire les gens si ça claque, faut pas se leurrer. Donc non, on va faire autrement. »
« -On fait comment alors ? »

Et me voilà parti dans TOR, OTR pour se protéger, le passage d’une connexion IRC en SSL, les petites choses de la vie qui protègent, GPG, j’en passe encore.

La machine était lancée mais, à cette époque là, je ne le savais pas encore.

« – Fais attention à toi, vraiment, ça commence vraiment à éclater la-bas. »
« – Ne t’en fais pas, ça ira, je suis pas non plus direct dans les conflits, et puis c’est chez moi. »

Et elle à fermé IRC.

Nous étions tous deux loin de s’imaginer la suite des évènements : la révolution en Tunisie se terminait, je l’avais observé avec elle, nous avions relayé des informations. Puis ce fut l’Egypte, la Libye, la Syrie et dans bien d’autres pays encore, ceux dont les médias français ne parlent pas parce qu’ils ne sont pas intéressants ou parce que notre président ne pourra pas en tirer de mérite.

Un an aujourd’hui.

Beaucoup de choses se sont déroulées en un an, de belles choses lorsque les peuples retrouvaient leur liberté d’expression, lorsque les Internets étaient remis en place et surtout, lorsque l’on se disait « ok, pour eux tout ira bien. La suite maintenant, c’est quoi ? »

Un an passé à travailler de mon côté, avec mes p’tits bras pour aider comme je pouvais pour faire sortir l’information, un an composé de beaucoup d’articles sur ce sujet, beaucoup de mails, de conversations…

L’année qui s’achève est également remplie de fatigue, pour plein de raisons. S’aventurer dans ce chemin et essayer d’aider, c’est accepter de prendre du recul, de se dire « non, t’es pas Superman, tu peux pas sauver tout le monde non plus ». C’est un chemin parfois rempli de décisions lourdes et où il faut faire attention et ne jamais baisser sa garde. Car toi, pendant que tu as le cul sur ta chaise à parler et à diffuser, eux, ils sont dehors, parfois à courir pour ne pas se faire attraper. On m’a aussi dit (et encore récemment) « Big Boys don’t cry ». Foutaises.

Un an aujourd’hui et pas forcément que des bonnes choses non plus.

J’ai appris à me méfier un peu plus des gens et, surtout, de ceux qui veulent faire mieux. Le mieux, c’est l’ennemi du bien.

J’ai aussi appris à « accepter ». La perte d’un contact, d’une personne, la réponse à un mail qui n’arrive pas … même si c’est parfois difficile de ne pas se dire « j’ai fait un truc mal si ça se trouve. »

J’ai appris à penser à moi aussi, histoire de ne pas craquer, en restant connecté, j’ai appris à débrancher pour mieux rebooter. Enfin, j’ai appris à prendre des claques dans la tête.

Un an aujourd’hui et pourtant, la situation en Tunisie, en Égypte et ailleurs ne semble pas vraiment meilleure qu’avant.

Je suis toujours dans le même livre, j’ai juste tourné quelques pages et je ne connais pas encore la fin de tout ça. Ce que je sais en revanche, c’est que lorsque je me dis que tout ceci ne sert à rien, je n’ai qu’à revenir au début, cette soirée du 18 janvier 2011.

Poutine n’aime pas Internet et les Internets le lui rendent bien.

Ce billet n’est pas de moi mais de Tris Acatrinei.

Le Monde publiait dimanche un article sur Vladimir Poutine, qui a enfin ouvert son site Internet, lui qui se vantait de n’avoir jamais écrit un seul email de sa vie. Dans une logique d’ouverture ou de démagogie, allez savoir, il a laissé un espace aux commentaires des internautes.

Commentaires qui laissaient relativement peu de place à l’imagination puisque 75% d’entre eux encourageaient M. Poutine à faire son Jospin. C’est là où on voit les erreurs de débutants puisque les commentaires n’avaient pas fait l’objet d’une modération a priori. Erreur rapidement réparée par un community manager qui a entrepris de faire le ménage dans les commentaires. L’anecdote est savoureuse et a de quoi égayer un dimanche d’hiver.

Mais le plus choquant n’est pas tant l’attitude de Poutine sur laquelle on ne fonderait de toutes façons aucun espoir mais plutôt les commentaires des lecteurs du Monde qui voient dans cet article une vendetta anti-russe et soupçonne le journaliste de partialité.

La Russie et les Internets, c’est une histoire d’amour à base de je t’aime moi non plus, teintée de schizophrénie. La criminalité informatique y est fleurissante : la bonne partie des virus informatique proviennent de Russie, on dénombre du trafic d’armes, de la pédo-pornographie, du blanchiment d’argent sans que les autorités compétentes n’y trouvent rien à redire – et pour cause puisque je les soupçonne fortement d’y trouver leurs comptes – mais les internautes font l’objet d’une surveillance à peine discrète et c’est Reporters Sans Frontières qui le dit. (http://fr.rsf.org/russie.html)

Qu’on se rassure, la plupart des pays de l’ancien Bloc de l’Est sont dans une situation plus ou moins similaire.

Mais c’est la Russie de Poutine qui est dans le collimateur. Peut-être parce que son régime un brin autoritaire cherche à devenir tentaculaire.

Qu’a donc essayé de faire l’aspirant chef du Gouvernement ? A montrer une sorte d’ouverture ? Qu’il était à l’écoute ? Pour cela il faudrait qu’il oublie de se présenter.

Et si c’était trop tard ? Les Révolutions Arabes ont montré qu’un dirigeant qui se réveillait au dernier moment pour essayer de s’allier les internautes pouvait assez mal finir.

Les internautes ne sont pas dupes. Internet est l’espace le plus propice à la contestation, à l’explosion de colère, à la fermentation des germes de la révolte. On ne contrôle pas Internet et encore moins les internautes.

Tout comme la plupart des pays de l’Est, la Russie n’a fondamentalement pas beaucoup changé depuis la chute de l’URSS. La différence notable réside dans le fait que ceux qui s’en mettaient plein les poches de manière très discrète sous le soviétisme le font de manière beaucoup plus ostentatoire maintenant.

Et la liberté d’expression me direz-vous ? Foutaises. Il suffit de voir la carte de Reporters Sans Frontières (http://fr.rsf.org/IMG/pdf/carte-2011-2.pdf ) pour se rendre compte qu’il y a des choses qui continuent à être taboues dans les médias, qu’ils soient mainstream ou confidentiels. Or, à partir du moment où la presse n’est pas libre de s’exprimer, c’est que les personnes ne le sont pas. Ce qui est une raison suffisante pour que la grogne s’intensifie.

Et lorsque les internautes se révoltent, les choses peuvent effectivement devenir difficiles pour les gouvernements en place. Surtout dans un pays avec une superficie et une population importante. Sauf que personne n’a intérêt à ce que les Russes refassent une Révolution.

Car une Révolution Russe ébranle toute cette zone géographique : les pays de l’Est, les anciens Républiques Soviétiques, mais également la Chine. Et personne n’a envie que cette région devienne incontrôlable. Et en disant personne, il faut comprendre les différents gouvernements.

Oui, le silence des Russes arrange bien des gens. Mais il faut se méfier des grognes URL qui peuvent très rapidement devenir IRL. Et lorsque cela arrivera, les choses seront beaucoup plus compliquées.

Il était une fois l’ARJEL.

Je vais vous raconter une petite histoire :

Il était une fois un vice, celui des jeux d’argents. Dans un tout petit pays, la France, tout le monde savait que les jeux d’argents étaient addictifs mais, pour le petit roi de ce petit pays et les gros lobbies français des jeux d’argents en ligne, ce n’était pas assez. Le président eut alors une idée : forcer le passage pour la création d’une autorité « indépendante » de régulation des jeux en ligne.

Il voulait que cette autorité puisse « valider » des sites de jeux d’argent en ligne comme étant légaux, ou non. Avec un label délivré par l’ARJEL, le site d’argent pourrait fonctionner en France.

Les gros lobbies voulaient que SEULS les sites validés soient accessibles, alors ils eurent une idée : demander à l’ARJEL de faire bloquer les autres sites, ceux que l’autorité n’avait pas validé.

C’est ainsi qu’un premier janvier de l’an 2012, un décret fut publié. Décret qui sacralise le filtrage par DNS. Ainsi le gouvernement français fit du blocage DNS le blocage « par défaut »,  se rapprochant encore un peu plus d’une boite de pandore qu’il ne faut pas ouvrir : celle du filtrage préventif et généralisé.

Fin de la gentille histoire, passage aux faits :

L’article 1 du décret généralise le filtrage par DNS par défaut, c’est-à-dire que l’on bloque le nom de domaine directement. Les opérateurs (F.A.I) pourront cependant filtrer d’une autre façon s’ils le souhaitent (et croyez-moi, il y à pire que le blocage DNS et m’est d’avis que certains F.A.I vont vouloir bloquer autrement), ils ne seront cependant pas indemnisés des frais engagés dans la procédure de blocage dans ces cas-là.

Ce premier article pose deux problèmes : Les F.A.I peuvent bloquer comme ils l’entendent, traduction : laisser un flou technique dans ce blocage, c’est accepter les pires techniques de blocage possibles, le décret n’imposant pas explicitement une méthode.

Second point, l’efficacité de ce blocage : Le blocage par DNS n’est efficace que sur un DNS, il suffit donc de changer ses serveurs DNS pour contourner le blocage. Dès lors, où est l’intérêt d’un blocage par DNS ? La réponse est simple : nulle part.

Benoit Tabaka (le secrétaire du Conseil National du Numérique, une personne au point sur le droit) m’expliquait ce matin qu’a priori, une injonction judiciaire imposait une obligation de résultat, c’est-à-dire que le site ne doit plus du tout être accessible. Si on résume donc, le gouvernement considère le blocage DNS comme blocage par défaut, ce dernier n’est pas efficace. Le blocage sur injonction judiciaire sous-entend une obligation de résultat. Le blocage par DNS ne peut pas garantir ce résultat. Je crois que vous avez compris le truc, c’est un serpent qui se mord la queue si on reste sur un blocage par DNS.

Les  F.A.I seront alors tentés de bloquer autrement, afin d’être plus efficace… mais comme précisé juste avant, le gouvernement ne demande pas un autre blocage (et en même temps, ne l’interdit pas).

La façon dont le décret est rédigé est mesquine car elle demande un blocage efficace en considérant par défaut un blocage qui ne l’est pas (celui sur les DNS), c’est, pour l’Etat, une façon de se dédouaner d’un éventuel sur blocage ou d’une éventuelle inefficacité de ce dernier (aussi astucieux que mesquin et dangereux).

Les articles suivants portant sur les modalités d’indemnisation et ce billet ne s’y intéressera que très peu, PCInpact ayant déjà fait une très bonne analyse du problème.

Une question me vient : vers quoi ce décret nous dirige ?

J’ai une éventuelle réponse et elle risque de vous déplaire : vers un filtrage national et généralisé. Dans un précédent rapport de l’ARJEL, il était question de créer un « truc national » qui s’occupe de gérer la liste de noms de domaines bloqués, de mettre à jour cette liste et d’éventuellement intervenir en amont des DNS, sur les BGP. PCInpact s’interroge à juste titre : est-ce que ce décret ne serait pas la première brique du « truc national » ?

La fin de l’histoire n’est pas « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants », mais plutôt « et c’est ainsi que le filtrage généralisé s’invita en France. Ce fut la première brique du régime de censure que nous connaissons actuellement ».

Deux points pour finir, peu factuels cette fois :

–          l’ARJEL vous enfume. Elle prétend contrôler les jeux d’argent en ligne afin de vous protéger des addictions à ces derniers mais la réalité est différente : elle s’en tape.

Ce qui l’intéresse, c’est qu’à la fin du site ou vous aller claquer toute votre thune, il soit inscrit « .fr », c’est tout ce qui compte. Dépensez tout votre argent dans les jeux en ligne, dépendez de ces derniers, tant que c’est un « .fr », c’est parfait.

–          Le blocage par DNS va créer un écart d’accès à certains sites entre les personnes qui savent contourner un blocage DNS et ceux qui ne le savent pas. Peu à peu, nous entrons dans un Internet plus trop neutre et qui n’est plus trop Internet et ça, trop peu de gens en sont conscients.

Le petit guide officieux de l’officiel futur dissident Français. Étape 2.

Comme vous l’aurez compris, ce billet fait suite au dernier billet du blog, que je vous invite à consulter avant de passer à la suite.

Dans ce billet, je vais essayer d’expliquer plus en détails la première phase. Cette fois-ci, vous allez avoir droit à des faits, des cas concrets, toussa toussa.

L’action :

Lors du précédent billet, j’abordais le problèmes des dérives sécuritaires liées aux différentes évolutions de la loi dans divers domaines (sécurité, sécurité des données, propriété intellectuelle, …) mais, en pratique, comment se manifestent ces dérives ? Ce billet se présente donc comme une sorte de résumé de tout ce qu’il se passe actuellement dans notre pays. Merci à l’ami @Cabusar pour les idées apportées lors du dernier billet, elles sont présentées ici.

Tout d’abord, et afin de bien comprendre tout le reste, il faut parler d’une notion importante : l’inconscient collectif. C’est un avis strictement personnel mais j’ai l’impression qu’il fonctionne énormément (et principalement au travers des médias « mainstream », mais pas que).

Qu’est-ce que l’inconscient collectif ?

C’est un ensemble de choses, de codes et d’actions qui conditionnent certaines de nos pensées ou réactions. Ces choses peuvent exister depuis la naissance, être liées à un pays ou à une culture, une religion, …

Un des exemples que j’aime prendre, c’est celui des enfants : la plupart des filles jouent avec une mini-cuisine, les garçons jouent à la guerre comme on dit. Ce simple fait représente, selon moi, une partie de l’inconscient collectif.

Inconscient parce, lorsque vos parents sont allés vous acheter quelques jouets, la première fois, c’était en fonction de votre sexe et non en fonction de vos envies (je trouve les jouets des tout petits relativement neutres). Pour appuyer cette impression, réfléchissez un instant : imaginez votre fils jouer avec des poupées et ceci jusqu’à 6-7 ans ou plus. Que ressentez vous?

Pour avoir un couple d’amis dans cette situation, ils se sont inquiétés : « Pourquoi ? » « Qu’est-ce qui arrive ? » « Pourquoi n’est-il pas comme tous les autres ? ».

Voyez-vous ou je veux en venir ?

Le fait que votre enfant ne « rentre pas dans les petites cases » inquiète, parce que depuis longtemps, les hommes font la guerre et les femmes jouent avec des poupées et sont dans la cuisine. C’est un peu ça, l’inconscient collectif. Une sorte d’intelligence capable de réfléchir inconsciemment à l’échelle d’une planète et, par la suite, de faire adopter un schéma de pensée et de réactions qui sont plus de l’ordre du réflexe que de la pensée consciente. (Le cycle de Fondation est définitivement quelque chose de passionnant).

Partant de cet inconscient collectif, je vais essayer d’expliquer ce que j’entrevois des dérives sécuritaires, en France. Je vais tenter d’être le plus neutre et le plus factuel possible afin de ne pas faire de parti pris.

La CNI (Carte d’Identité Nationale) numérique :

La nouvelle carte d’identité est validée depuis peu, elle se présentera sous la forme d’une carte à puce qui contiendra un ensemble de données vous concernant, au format numérique. La base de départ de la nouvelle CNI est totalement légitime (comme à chaque fois) : lutter contre les fraudes, la falsification de cartes d’identité, pouvoir trouver plus facilement les usurpateurs d’identité. C’est un but louable.

Les données de la CNI seront conservées sur un fichier central, ce qui selon moi représente déjà un problème de sécurité et de confidentialité  des données, la CNI contenant un ensemble de données assez privées.

Des critiques ont été formulées sur le sujet de la CNI. En effet, les données de la CNI devaient-être conservées au maximum 15 ans, hors, ce délai semble absent de la proposition de loi adoptée. On peut légitimement se demander l’intérêt de converser des données personnelles ad vitam. Une autre problématique est soulignée : cette CNI est censée faciliter la lutte contre l’usurpation d’identité, la CNI devenant la nouvelle carte d’identité, chaque demande de carte entraînera un fichage d’une personne et, à terme, cela va créer une base de données de la population française.

L’inconscient collectif entre alors en jeu. Cet inconscient existe aussi en politique, soit à grand coup de peur, soit à grand coup de logique implacable (cf. l’exemple des antibiotiques dans mon précédent billet). La logique voudrait que l’on se pose des questions sur la CNI et pourtant, essayez dans votre entourage, c’est loin d’être le cas, personne ne voit où est le problème dans le dispositif.

Voir Claude Guéant dire qu’il est pour que les forces de police puissent se servir du fichier central, le voir dire qu’il est indécent de s’opposer « à ce que la justice utilise tous les moyens pour faire triompher la vérité » devrait nous faire bondir, éveiller nos sens, se dire que c’est trop gros pour-être vrai, et neutre.

Voir ce passage devrait également nous faire bondir :

Éducation dès l’école maternelle, les enfants utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents ou leurs représentants s’identifieront pour aller chercher les enfants.
Introduction dans des biens de consommation, de confort ou des jeux : téléphone portable, ordinateur, voiture, domotique, jeux vidéo
Développer les services « cardless » à la banque, au supermarché, dans les transports, pour l’accès Internet,

Ce passage résume à lui tout seul la technique d’acceptation du contrôle : instaurer un contrôle dès la plus tendre enfance afin que cela ne choque plus personne, afin que cela rentre dans les habitudes, dans l’inconscient collectif. Faire en sorte que cela ne gène plus personne, vous faire accepter inconsciemment votre mise sous surveillance.

Excusez-moi, mais un fichier central qui va répertorier les données privées et biométriques de 45 millions de personnes, moi, je me pose des questions, je m’inquiète. Le passé nous à déjà montré que ces fichiers étaient ensuite déviés de leur utilisation principale, prenez par exemple le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG).

Justement, parlons en du FNAEG.

FNAEG, c’est l’acronyme de Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques. Ce fichier, crée en 1998, devait initialement contenir les empreintes des ADN prélevés lors d’enquêtes. Ce fichier a bien changé depuis le temps : il ne devait contenir que les traces des violeurs ou délinquants sexuels. Par la suite, il a été étendu (par les socialistes au passage) aux coupables de dégradations dangereuses ou d’extorsion. Ce fichier a depuis encore changé, puisqu’en 2003, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy, il est décidé que ce fichier devra répertorier la quasi totalité des délits y compris des simples « mises en cause ». J’ai également entendu parler d’un prélèvement ADN dans les écoles alors qu’ici, il n’était pas question de délits, néanmoins, je n’ai pas trouvé de sources précises confirmant ces faits. De l’autre côté de l’océan atlantique, ils parlent même de fichier l’ADN directement chez les bébés.

Avec le temps, cette base s’est transformée en fichier de fichage généralisé…et c’est le Syndicat de la magistrature qui le dit.

Des procédures pas très très légales et des fadettes

La justice s’en mêle maintenant mais il ne faut pas oublier l’affaire des écoutes illégales réalisées afin de trouver les sources de divers journalistes du jounal « Le Monde », à l’occasion de l’affaire Bettencourt. Deux personnes donc, Gérard Davet et Jacques Follorou, journalistes au Monde. Pour un des articles du journal, voici ce qui a été demandé par l’IGS (l’inspection générale des services) : des fadettes.

Les fadettes, ce sont les factures détaillées mensuelles de vos communications chez votre opérateur. Dans la version que vous avez, c’est une version ultra-light, exemple d’une fadette complète chez SFR :

« les appels, les SMS ou MMS envoyés ou reçus, le numéro de téléphone du suspect, celui de son correspondant, éventuellement celui d’un troisième interlocuteur, la date, l’heure, la durée de la communication, la cellule (la borne téléphonique utilisée) et le numéro IMEI du téléphone, c’est-à-dire l’International Mobile Equipment Identity, (et) le numéro unique de chaque portable » (Source Numérama)

Ces données permettent, par exemple, de tracer les appels d’une personne, de savoir ou elle se situait lors de l’appel et ainsi de cartographier ses déplacements pendant la période observée.

L’ironie, c’est que l’IGS s’est trompée de numéro, puisqu’ils ont commencé avec le portable de la fille de monsieur Davet. Ce qui sous-entend donc que ces informations existent également à votre sujet.

A nouveau, si cela ne vous fait pas bondir, le fait qu’un opérateur puisse savoir ou j’étais, ce que je faisais, à qui je parlais, pendant combien de temps, si je me suis déplacé, si je lui ai envoyé un sms, un mms, une photo, … Ça m’inquiète, ce n’est pas normal, c’est une atteinte à la vie privée.

Et le reste, dans tout ça

Le fait que les renseignements généraux vous fichent lors d’une manifestation, le fait que les services de la DCRI vous fichent lorsque vous commencez à trop l’ouvrir, le fait vous soyez fiché « un peu plus » si vous n’êtes pas d’origine Française, … tout ceci est inquiétant.

Alors, évidemment, il ne faut pas sombrer dans la paranoïa profonde, mais il faut bien se dire une chose : plus le temps passe, plus le gouvernement avance sur le fichage généralisé de l’ensemble de la population. du FNAEG à la prochaine CNI numérique, tout est fait pour que l’on saches tout de vous.

Le but n’est pas de contrôler, ils en sont juste incapables. Incapables pourquoi ? Réfléchissez un instant…

C’est une amie que j’apprécie beaucoup qui m’a donné la réponse : ils en sont tout simplement incapables parce analyser les données de 60 millions de personnes, c’est juste impossible, il n’y a pas assez de budget, pas assez de personnel et pas assez de compétences au sein du gouvernement pour le faire.

Non, le but, c’est que le gouvernement vous transmette un message : « où que tu sois, qui que tu sois, peu importe ton métier, ta vie… je te vois. Je peux te voir, je peux t’entendre, toi et tous les autres… alors fais attention. »

Il est possible qu’un jour des services d’analyses soient dimensionnés pour analyser presque en live tout ceci, mais ce jour n’est pas arrivé.

En attendant, si vous voulez un peu de vie privée, il faudra attendre le troisième et ultime billet de cette série.

Syrie : circulez, il n’y a rien à voir.

Petit billet sur la Syrie afin d’expliquer quelques points à une Informatrice un peu trop Zélée…

Pour ceux qui se renseignent, vous n’êtes pas sans savoir que le régime de Bachar Al-Assad n’est pas franchement tendre avec son peuple, et c’est pas peu dire : prison dans le meilleur des cas, exécution dans d’autres. Les opposants au régime sont traqués en Syrie et dans le monde entier, en Suisse par exemple…mais également en France.

Seulement voilà, le régime, tout comme son sanglant dictateur d’ailleurs, sont loin d’être stupides. Les yeux des organisations humanitaires sont tournés vers eux, tout comme ceux de l’ONU, l’OTAN, l’Europe, … (rayez la mention inutile) et Al-Assad, tout comme son régime, savent s’en accommoder…

Les dernières manifestations ont démontré l’intelligence (pas dans le bon sens) du régime. Laisser des manifestants s’exprimer était la meilleure des solutions et le meilleur coup médiatique pour Al-Assad. A l’heure ou quasiment tout les yeux sont rivés sur la Syrie, quoi de mieux qu’une manifestation pacifique, sans intervention militaire ?

Ils se tenaient à distance, prétextant la volonté de maintenir l’ordre en cas de débordement… ils étaient surtout dans cette configuration pour faire bonne image, rien de plus. Le régime d’Al-Assad est un des plus violents que j’ai eu l’occasion d’observer depuis le printemps arabe et, paradoxalement, c’est celui qui a la meilleure « image publique ». Al-Assad se présente comme une personne saine d’esprit, propre sur lui et qui pense à son peuple et à son pays.

La vérité est différente. Al-Assad est un fou, les mains tachées de sang, il ne pense pas à sauver son pays mais à traquer et tuer les opposants du régime. C’est un fou et, entre le génie et la folie, il n’y a qu’un pas.

Si Al-Assad était si gentil, comme le pense cette con Informatrice zélée, pourquoi refuserait-il la visite de représentants de l’ONU en Syrie ? Pourquoi a-t-il fait poser des mines sur l’ENSEMBLE des frontières de la Syrie ? Pourquoi utilise-t-il (lui et les Etats-Unis, au passage) un système de contrôle, un DPI, un monstre capable d’écouter tout le peuple Syrien, une technologie capable de trouver les dissidents et les (h)ac(k)tivistes opposés à son régime.

Réfléchissez-y, la prochaine fois que vous entendrez parler de la Syrie. S’il semble ne rien s’y passer, c’est parce que l’information est filtrée et que vous avez le droit de voir Bachar Al-Assad au pays des bisounours… pendant qu’en coulisses, le peuple Syrien se fait dézinguer, non pas avec le DPI, mais bel et bien avec du plomb cette fois.

La seule chose certaine, c’est que Bachar Al-Assad doit (et sera) au mieux traité comme un criminel devant le Tribunal Pénal International, au pire il se tuera ou sera tué (ce que je ne souhaite pas, je suis certain qu’il aurait plein de choses à dire…)

La seule question est : « encore combien de vies avant que Bachar le fou quitte la tête de la Syrie ? »