Réponse de mauvaise foi à un homme de mauvaise foi : @PascalNegre

Ce billet n’est d’aucune utilité. Du moins, il est de la même utilité que la personne à qui il est destiné, à savoir Pascal Nègre, le président d’Universal Music France. Encore que je préfère Universal en deux mots, c’est sans doute plus proche de la réalité.

Ce billet est de mauvaise foi, au moins autant que M. Nègre, je ne proposerai donc pas d’argumenter et de répondre point par point à la récente déclaration dudit monsieur, accordée à Yahoo! Finance et publiée dans « L’envers de l’éco ».

Ce billet n’est bien évidemment pas à prendre au second degré, au moins sur la forme. Le fond est bien sur vide, plat et sans intérêt, au moins… bref vous avez compris la suite.

Il y a une chose que je déteste particulièrement, c’est terminer une prise de tête sans avoir pu argumenter, alors je profite de ce billet pour le faire.

Petite remise en contexte pour démarrer.

Tout commence avec un titre qui me fait bondir : « Pour Pascal Nègre, « aller pirater, aujourd’hui, il faut vraiment être tordu » », publié sur Numérama, le billet me mène vers une interview d’environ 9 minutes.

Naturellement, après écoute et lecture du billet et de la vidéo de Yahoo!, j’interpelle Pascal Nègre sur le même ton qu’il emploie avec nous, les tordus.

Cette réponse ne semble pas lui plaire et s’en suit un échange de quelques tweets hautement improductifs où ce grand monsieur, au moins par la taille de ses fonctions, n’argumente pas et ne produit aucune réponse constructive.

Bref, du Pascal Nègre. Il est toujours plus simple de ne pas argumenter, surtout avec un très fidèle détracteur mais étrangement, cet homme disparait systématiquement dès lors qu’un argument ne va pas « dans son sens » et, parce que je ne porte pas cet homme en haute estime, je vais tenter de lui tendre une perche pour qu’il avance dans le débat. Perche qu’il ne prendra sans doute pas, pour changer.

Passons au contenu:

Première remarque : « Pour Pascal Nègre, « aller pirater, aujourd’hui, il faut vraiment être tordu » »

A elle seule, cette remarque mérite le mépris, puisqu’elle méprise ceux qui téléchargent en considérant que ces gens sont des « tordus ». D’ailleurs, le début du billet était aussi méprisant que cette remarque afin d’insister sur le côté désagréable de la chose.

Ce n’est pas en considérant les gens comme des tordus, M. Nègre, que vous allez construire quoi que ce soit. Votre industrie finira par mourir si vous ne changez pas au moins de façon de considérer les choses et les personnes. Je suis client, comme beaucoup d’autres ici, merci de ne pas nous considérer comme des tordus.

Vous irez également expliquer à ces « tordus » leur fâcheuse tendance à avoir souvent raison. L’avenir appartient à ceux qui sont tordus, donc.

Pascal Nègre parle ensuite des « plateformes légales et mondiales d’écoute », il parle sans doute de Deezer, Spotify, Youtube & Co.

Si sur le papier, c’est très beau, dans la réalité c’est tristement moche, pour ne pas dire totalement pourri.

Pourquoi ? La réponse est simple : Deezer fonctionnait bien, avant. Avant que les maisons de disques et les ayants droits viennent s’essuyer les pieds sur le site, avant que des titres disparaissent du catalogue, avant que l’argent édicte les règles du site.

Pascal Nègre oublie également un problème de taille : la restriction en fonction de votre adresse IP.

Si vous ne le savez pas, il existe un grand nombre de restrictions qui ne vous donnent pas accès à la même chose en fonction de votre adresse IP. Si elle est anglaise, française, italienne ou allemande, vous aurez plus ou moins de choix, parfois même pas du tout ou quasi rien.

C’est mignon, M. Nègre, de parler de ces magnifiques plateformes légales d’écoute. Il aurait été bon de parler des problèmes liés à ces plateformes, mais ça, ça reviendrait à être réaliste, ce qui n’est manifestement pas votre cas.

Pascal Nègre explique ensuite que plus d’un milliard de terriens se connectent à Youtube. C’est sans préciser à nouveau les très fortes restrictions de ce site, qui peut vous empêcher de voir une vidéo française, en France (morceau : un point c’est toi, artiste : Zazie, vidéo numéro 5). Il ne précise pas non plus que ce site est à la solde des ayants droits, en effet, des accords révèlent que des ayants droits peuvent faire un takedown (la suppression d’un contenu sur Youtube) en invoquant … bah… en le demandant, sans vraies bases. Chez moi, une entreprise privée qui retire elle-même un contenu d’une autre entreprise, c’est de la censure.

En parlant de censure, l’article précédent parle d’Universal, coucou Pascal Nègre.

Le président d’Universal Music France parle ensuite de la diffusion l’ensemble des créations et de leur monétisation. Le problème ici, ce n’est pas la monétisation, c’est la création.

Ce qui suit n’est que mon avis, heureusement d’ailleurs. Je sais qu’il en faut pour tout le monde, que la musique c’est un art, et que chaque personne apprécie l’art différemment, simplement, parler des mêmes arrangements que l’on retrouve dans ces mêmes sons, ce n’est ni de l’art ni de la musique, selon moi.

La musique, M. Nègre, c’est bien plus que du son, j’aime la musique lorsque je la ressens, lorsqu’elle est capable de me transporter, lorsque je sens le travail dans chaque accord ou chaque note de l’artiste.

Ce que vous vendez, généralement, ce n’est pas ça. Vous vendez du son, quelque chose fait pour faire des sous, ce n’est pas de la culture, c’est une industrie du son qui se fait passer pour une nécessité dans la culture. Presque une imposture.

Vous parlez ensuite de monétisation. C’est légitime d’être payé pour ce que l’on produit. Je travaille et à ce titre, j’ai un salaire. Vous aussi.

Trouvez-vous normal qu’un artiste ne touche qu’une infime partie de son travail ? Moi non.

Vous aurez toutes les excuses du monde : qu’il y a les frais, la communication, le merchandising, les intermédiaires, cela ne change rien.

Vous avez, dans votre bataille pour gagner toujours plus, oublié quelque chose : vous n’êtes rien. Sans les artistes, vous n’êtes rien. Vous n’existez pas sans eux, sans leur talent, leur création, voix, notes, riffs de guitare ou autre.

Dans mon monde, un organisme qui vient se greffer sur quelque chose et fait croire qu’il est indispensable, c’est un nuisible, un parasite. Je ne vous décerne pas ce titre, mais vous n’en êtes pas loin. La culture et la musique existent depuis toujours et continueront d’exister, avec ou sans vous.

Vous parlez également d’itunes, et là encore vous parlez donc de quelque chose de très fermé. Je n’ai pas à me plier aux volontés de restriction d’un moyen de diffusion. C’est à la société de s’adapter.

Imaginez un instant une entreprise qui demande à ses clients de s’adapter à son mode de fonctionnement, elle fermera sans nul doute, l’offre ne correspondant pas à la demande.

Pascal Nègre parle ensuite de la riposte graduée, cette chose censée nous faire croire que la Hadopi et bientôt le CSA sont « gentils ». A cette riposte et à cette criminalisation de l’échange non marchand, je répondrai une chose :

Un jour, un grand homme a déclaré la chose suivante (l’auteur de cette citation est un peu plus bas) :

« Le livre comme livre, appartient à l’auteur, mais comme pensée, il appartient – le mot n’est pas trop vaste – au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l’un des deux droits, le droit de l’écrivain et le droit de l’esprit humain, devait être sacrifié, ce serait, certes, le droit de l’écrivain, car l’intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare doivent passer avant nous. »

Je ne vais sans doute étonner personne, mais je suis pour cette vision-là, moi. Pour la diffusion de l’art, de la Culture, à la condition qu’il s’agisse d’un partage non marchand.

C’est sans doute un tordu qui a déclaré ceci… C’est bien connu, Victor Hugo était un tordu.

Le CSA aura donc pour rôle la prolongation de celui de la presque défunte HADOPI (courage au personnel de cette autorité dans les prochaines démarches d’un futur emploi). Ce rôle est, selon moi : continuer à criminaliser les échanges non marchands. Hugo doit sans doute se retourner dans sa tombe.

Pour terminer, une petite remarque sur un propos de M. Nègre, à propos des différentes taxes à venir, il a déclaré la chose suivante, dans l’interview vidéo, disponible sur Yahoo Finances : « Ils ont mis des taxes là où ils pouvaient les mettre ».

M. Nègre, cette déclaration donne l’impression d’une taxe bancale – elle l’est, qu’on se le dise – et d’une volonté de taxer pour taxer. Si une taxe est placée là où elle peut l’être, c’est, peut-être, qu’on cherche juste à se faire encore plus d’argent, par tous les moyens.

Enfin, monsieur Nègre, je vais tenter une énième fois de vous expliquer quelque chose, je suis très patient, alors s’il faut encore l’expliquer pour que vous compreniez, ça sera avec plaisir.

Tant que l’offre pirate sera plus riche que l’offre légale, le téléchargement existera.

Tant qu’un DVD ou autre contiendra 30 minutes de pub, des avertissements sur le téléchargement illégal (j’ai acheté mon disque, bordel), alors ça ne fonctionnera pas parce que ça énerve tout le monde.

Tant qu’un e-book coutera aussi cher et même parfois plus cher qu’un livre « matériel », le piratage continuera.

Tant qu’un album coutera presque autant en version numérique qu’en version physique, le piratage continuera.

De façon générale, tant que vous et votre industrie mourante ne serez pas capables de proposer quelque chose au moins égal – si ce n’est mieux – à l’offre pirate, vous échouerez.

Ce n’est pas moi qui le dit mais la plupart des experts en la matière. Non, ce n’est pas moi, moi je n’ai pas d’arguments et je suis de mauvaise foi, n’est-ce pas.

L’industrie de l’anime a du faire face au piratage et figurez-vous que le piratage a des effets positifs sur la qualité des animes. (merci @jokerozen pour l’information) C’est l’évolution, adaptez-vous, ou disparaissez.

Ah oui, pour terminer, M. Nègre, on ne dit pas « des artistes taiwainiens » (passage à 5 :24), mais des artistes taiwanais, bisous.

Voilà, fin de l’explication. Si vous partagez mon avis, c’est que vous êtes des tordus, faites-le savoir à M. Nègre.

Signé un tordu qui, dans une semaine, va voir en concert une artiste qu’il adore et dont il n’a pas pu trouver l’album légalement sans galérer. Bisous.

ACTA : le mot est mort, l’idée reste : CETA arrive.

La semaine dernière, nous avons tué le mot ACTA. Après avoir fait la fête et bu quelques bières (ou quelques litres), nous vous mettions en garde contre les idées d’ACTA. Pour résumer, peu importe le nom de la loi, les idées allaient revenir, c’est chose faite.

Le traité CETA (Canada Eu Trade Agreement) propose de mettre en application des dispositions d’ACTA.

Pour résumer, ACTA est rejetée à une écrasante majorité (478 versus 39) et pendant ce temps-là, ACTA revient par la petite porte.

CETA va même plus loin que la reprise des idées d’ACTA puisqu’il est possible de retrouver des passages entiers d’ACTA en copie quasi conformes.

C’est, selon moi, un déni total des décisions prises la semaine dernière. Internet s’est opposé à ACTA, l’Europe a rejeté le traité et au final, un autre arrive, reprend les mêmes dispositions qu’ACTA et espère passer sans se faire repérer.

Nous devons faire en sorte que cela n’arrive pas.

L’information circule depuis quelques jours déjà. Si vous voulez que notre parlement agisse, il est de notre devoir de faire notre travail de citoyen. Vous êtes libre de diffuser l’information, contacter vos eurodéputés, insister sur le fait que vous ne voulez pas de ce traité et ne rien lâcher.

ACTA a été éjecté, ce n’est pas pour le laisser rentrer par la petite porte.

Edit :  Sous forme de tableau, les passages d’ACTA et de CETA qui se ressemblent sont présentés, dans cet article que je vous invite à lire. (en anglais)

(source)

Le mot ACTA est mort.

Aujourd’hui, par 478 voix contre 39, le parlement européen s’est prononcé contre ACTA. C’est une victoire pour ceux qui s’opposaient au flou du traité, au potentiel blocage des médicaments génériques, au brevets du secteur agricole, aux grandes puissances comme Monsanto et, évidemment, pour ceux qui s’opposaient à une menace contre Internet et la liberté d’expression.

C’est grâce au peuple et Internet que tout ceci a été possible, sans un appui spamming harcèlement des eurodéputés pour leur faire prendre conscience de la dangerosité d’ACTA, tout ceci ne serait pas arrivé.

Cette victoire marque, selon moi, un tournant dans l’histoire : massivement, le peuple s’est fait entendre. Il est maintenant difficile de dire que les opposants aux idées d’ACTA sont « 5 gus dans un garage » ou encore des « groupuscules terroristes ». C’est la victoire de la démocratie sur les lobbies qui ont fait pression sur les différentes instances européennes.

Ce soir, vous avez votre soirée (et j’en connais un qui va dormir un peu plus, quelques temps). Profitez-en bien, cette bataille est remportée. Félicitations à tous pour l’énergie investie, le temps consacré, les manifestations, les billets de blog, articles et j’en passe.

Il ne faut cependant pas relâcher la pression. Si le mot ACTA est bel et bien mort en Europe, les idées derrière continuent d’exister. Entre CISPA, INDECT et tous ces autres projets qui n’existent encore… le travail s’annonce long et bon nombre de batailles nous attentent encore avant d’espérer gagner la guerre.

Restons vigilants, mais pas ce soir ! Santé !

Un énorme merci à la Quadrature du Net et à cette bande de terroristes tueurs de chats pour toute l’énergie consacrée à lutter contre ACTA (et ça se compte en années).

 

La « Contribution à l’audiovisuel public » étendue aux ordinateurs… oui mais non.

Notre nouvelle ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, souhaite remettre sur la table un sujet de longue date : l’extension de la contribution à l’audiovisuel public (la fameuse « redevance TV »). Sous l’ancien gouvernement, ce sujet a déjà été abordé de nombreuses fois et s’est même heurté, il me semble, à une Questions Prioritaire de Constitutionnalité (la QPC).

Vous l’aurez compris, le sujet est délicat. Il l’est parce qu’on parle de financement, de taxe, qu’il couvre toute personne équipée d’un ordinateur et qu’on peut s’interroger sur la justification de cette décision.

Pour commencer, la contribution à l’audiovisuel public part du principe qu’on utilise son écran de télévision pour regarder les chaines publiques. Si la présomption d’utilisation d’un écran de télévision pour regarder les chaines publiques est relativement solide et évidente, elle l’est beaucoup moins pour un écran d’ordinateur.

On peut faire énormément de choses avec un écran de PC et, personnellement, je ne regarde pas les chaines publiques, je n’ai donc pas de raison de payer cette nouvelle et énième taxe. D’ailleurs, cette taxe ne s’adresse-t-elle pas qu’aux équipements équipés d’un tuner ? Un écran d’ordinateur n’en est pas équipé, même pour une TV connectée.

Dans un second temps, j’ai l’impression que cette taxe vient combler non pas une perte, mais un manque à gagner pour les chaines publiques, qui se sentent lésées de ne pas recevoir d’argent de ceux qui n’ont pas de télévision.

Un écran d’ordinateur devient de plus en plus important, parfois même quasi obligatoire : pour s’inscrire au pôle emploi, suivre ses enfants dans une école qui est passé au tout numérique et, dans certains cas, pour maintenir un lien social avec des amis ou parents. Cet écran ne sert pas à regarder la télévision, pourquoi ces personnes devraient contribuer à l’audiovisuel ?

Si des personnes (dont je fais partie) ont délibérément choisi de ne pas avoir d’écran de télévision pour des raisons économiques ou culturelles, est-ce normal de les taxer pour un service dont ils ne veulent pas bénéficier ? Selon moi, non.

La liste des arguments est longue pour expliquer que cette extension de taxe n’est pas une bonne idée. Je peux aussi parler des personnes qui passent par une connexion satellite en carton, celles qui reçoivent un débit tellement faible qu’elles ne peuvent pas avoir la TV sur PC, celles qui rencontrent des instabilités de ligne et qui sont donc dans l’incapacité de regarder la TV sur PC … et je suis sûr que vous avez d’autres arguments encore.

Je me demande même si cette taxe est légale (dans le sens du droit, droit fiscal plus précisément) : comment l’état fera-t-il pour récupérer cette redevance sur le prix d’un écran ?

Madame Filippetti, si vous manquez d’idées, n’hésitez pas à nous solliciter, je suis certain que nous pouvons trouver une meilleure idée que celle que vous avez.

Comme quoi, les idées complètement stupides ne viennent pas que de la droite, hein.

Pour l’instant pas d’inquiétude, le débat est prévu pour 2013… (et il fait déjà énormément parler de lui, je n’ose pas imaginer ce que ça sera en 2013).

Je ne suis pas un voleur.

Ce billet fait suite à un long débat (si on peut l’appeler débat), démarré d’une part par une chanson des rois de la Suède et, ensuite, par Alexandre Astier (le roi Arthur dans Kaamelott).

Je vous invite à passer sur la « Timeline » (le fil conducteur de Twitter) du sieur Astier, vous pourrez croiser des choses dans ce genre :

https://twitter.com/#!/sgtpembry/status/175503175846084609

https://twitter.com/#!/sgtpembry/status/175362048195170304

https://twitter.com/#!/sgtpembry/status/175517218476527616

Vous auriez pu également croiser des tweets qui parlent de vol et de baguette de pain (je le sais, puisque j’ai eu une réponse de M. Astier lorque je lui ai dit que ses arguments étaient pourris) :

https://twitter.com/#!/sgtpembry/statuses/175963282178441217

Alors, parce que parfois Twitter, c’est trop court pour s’expliquer, j’en fais un billet qui va remettre en place deux ou trois choses, donner ma vision sur deux trois autres points et, potentiellement, être un peu trollesque.

Dans un premier temps (et M. Astier, c’est pour toi également), il convient de revenir sur un point qu’on rabache depuis déjà des années mais qui ne semble pas rentrer dans le crâne des gens :

Le téléchargement, ce n’est pas du vol.

Ce n’est pas moi qui le dit, c’est la loi. Elle fait la différence entre le vol (article 311-1 du code pénal) et la contrefaçon (article L335-3 du code de la propriété intellectuelle).

Donc, ne serait-ce que dans un contexte légal et juridique, le téléchargement ce n’est pas du vol. M. Astier, retiens-le, ça fait déjà cinq ans qu’on s’efforce d’expliquer ce point pour répondre à cet argument stupide qui consiste à dire que le téléchargement, c’est du vol. Bisous.

Dans un second temps, je parle rapidement de la fameuse « baguette de pain ».

Pour ceux qui n’ont encore jamais croisé cet argument, il consiste à dire que télécharger, c’est comme voler une baguette de pain.

Mr Astier, vous êtes (je pense) loin d’être stupide mais cet argument, vraiment, il aurait fallu éviter. D’une part parce que ça fait 30 000 fois qu’on le dit : le téléchargement ce n’est pas du vol, d’autre part, parce que cet argument a été sorti, re sorti, re re sorti, re re re… et qu’au final, c’est se tirer une méchante balle dans le pied que d’oser s’en servir.

Pour être exact, il faudrait d’ailleurs dire : qu’une personne rentre dans la boulangerie, utilise les outils du boulanger pour fabriquer la même baguette de pain (copie conforme, attention).

Le téléchargement, et le numérique de façon générale, sont l’exact opposé de l’économie matérielle et la copie est une très bonne représentation de ce fonctionnement :

  • Dans la vie physique, si je soustrais le bien, un bien à quelqu’un, c’est du vol. L’utilisateur ne dispose plus du produit et il ne peut plus s’en servir ou en tirer profit.
  • Dans la vie numérique, la copie duplique un fichier, c’est à dire qu’à la fin, l’utilisateur possède toujours l’original, peut toujours s’en servir ou le vendre, simplement, une personne dispose d’une copie du dit fichier. C’est ce que l’on appelle l’économie de l’abondance. Elle échappe encore à pas mal de monde, surtout aux majors, qui refusent de s’adapter à ce nouveau système qu’ils ne comprennent pas, ni ne contrôlent.

Je vais vous dire un truc. La théorie de l’évolution de Darwin s’applique également à Internet. Si on ne s’adapte pas, on meurt. C’est brutal mais c’est vrai, que vous le vouliez ou non (il suffit d’observer le cas de MySpace pour s’en rendre compte).

Nous traversons une période relativement houleuse en ce moment, la HADOPI d’un côté, une volontée de criminalisation des échanges non marchands de l’autre, ce n’est pas franchement la fête… et le pire c’est que cela s’est déjà produit, il y a des siècles.

A l’époque, il était question de la reproduction d’écrits, de livres. Ce savoir appartenait aux moines copistes du corps religieux, détenteurs du savoir. Ils recopiaient sans cesse des livres… puis l’imprimerie est arrivée et ce fût la catastrophe, l’apocalypse même.

Les moines copistes se sont opposés à l’ère de l’imprimerie car il devenait facile de recopier des livres, encore et encore, ceci dans le but de diffuser rapidement et massivement le savoir contenu dans ces écrits. Les moines copistes ont refusé cette évolution et, par ce choix, se sont mis au placard seuls avant de disparaitre.

L’évolution est une chose qui ne peut-être arrêtée, on peut mettre du temps pour s’y adapter mais qu’on la refuse ou non, personne ne peut la stopper. Internet est une évolution aussi importante que l’imprimerie, si ce n’est plus.

Alors bien sur, penser que toute la culture doit être gratuite, c’est une utopie. Il faut que les artistes puissent vivre, manger, que le personnel soit rémunéré et le matériel qui sert à faire un film ou une musique payé. Pour autant, criminaliser l’échange non marchand, c’est tout aussi stupide :

  • Un téléchargement ne signifie pas une vente en moins, bien au contraire. De nombreuses personnes n’achèteraient pas si elles ne pouvaient pas télécharger.
  • Le téléchargement non marchand est, par nature… non marchand. Personne ne se fait de bénéfice, tout est partagé dans le but de diffuser la culture.
  • Le téléchargement est, parfois, la seule possibilité pour accéder à des contenus.

Un téléchargement ne signifie pas une vente en moins : à l’heure actuelle, il n’existe aucune étude démontrant que le téléchargement illégal génère un manque à gagner pour l’industrie de la culture. La HADOPI constate dans un rapport (http://www.hadopi.fr/actualites/agenda/presentation-de-l-etude-hadopi-a-cannes-lors-du-midem-23-janvier-2011.html (page 45 de la version longue)) que même ceux qui déclarent téléchargent illégalement déclarent acheter, un poil plus que les autres.

Une autre étude, réalisée en 2010 par l’Université de Rennes 1, (http://www.marsouin.org/IMG/pdf/NoteHadopix.pdf ) explique que ceux qui téléchargent sont ceux qui achètent, en disant la chose suivante :

Enfin, les « pirates numériques » se révèlent être, dans la moitié des cas, également des acheteurs numériques (achat de musique ou de vidéo sur Internet). Couper la connexion Internet des utilisateurs de réseau Peer-to-Peer pourrait potentiellement réduire la taille du marché des contenus culturels numériques de 27%. Une extension de la loi Hadopi à toutes les formes de piratage numérique exclurait du marché potentiellement la moitié des acheteurs de contenus culturels numériques.

Des exemples : Le plus gros succès de l’année 2011, à savoir Avatar, à également été le film le plus téléchargé. Nous pouvons également citer « Bienvenue chez les ch’tis », énorme succès et pourtant, nombre énorme de téléchargements. Pour 2012, nous pouvons citer Intouchables qui a fait un carton au box office et qui, pourtant, a été énormément téléchargé.

Je télécharge parce que je suis curieux, parce que j’ai envie de découvrir, parce que moi aussi j’ai le droit d’accéder à la culture, même si je n’en ai pas toujours les moyens.

Lorsque j’apprécie ce que j’ai téléchargé et que j’ai les moyens de me le payer, je n’hésite pas à le faire, mais c’est rarement le cas. Le téléchargement m’a fait découvrir plein de choses, de beaux films ou d’excellents artistes et leurs albums, que j’ai acheté par la suite.

Qu’on se le dise, en ce qui concerne la musique, je n’achète pas du commercial. De plus en plus, les majors nous vendent du son et pas de la musique, les paroles ne sont pas recherchées, le clip non plus, la musique à la même saveur que toutes les autres : elle est fade.

Exemple personnel : j’ai découvert récemment « The Petebox », c’est un jeune artiste anglais qui fait un travail exceptionnel et qui s’implique vraiment dans son travail, c’est beau à voir et à entendre, j’ai téléchargé ses musiques et il est clair que j’achète l’album dès qu’il sort. Son album est d’ailleurs à 15 £ (soit 18 €) pour la version CD avec la version numérique jointe.

Le prix est d’ailleurs un autre problème : comment peut-on aller voir un film lorsque la séance coûte 13 € (ce qui est le cas dans ma ville), comment peut-on acheter un album qui en coûte 25 ou une musique qui coute 1 € alors que c’est un fichier numérique.

Prenons une famille qui veut aller au cinéma, les parents et deux enfants (ou trois), vous calculez, avec une séance à 13€, ça fait minimum 52€. Autant attendre que le DVD sorte, mais celui-ci ne sort pas directement, chronologie des médias oblige.

Que faire alors ? Attendre là et se priver d’accès au film ou manger du pain et de l’eau tout le mois pour aller voir un film ? Le téléchargement sert aussi dans ces cas-là car c’est un moyen d’accéder à quelque chose que l’on a pas forcément les moyens de se payer.

Dans le cas « Astier », je peux également parler de Kaamelott : pour le regarder, il faut avoir la télévision (donc payer une redevance), ce que beaucoup n’ont pas ou plus les moyens de se payer. Solution : passer par son FAI pour avoir la télévision… sauf que sans petit écran, certaines chaines ne sont pas disponibles et M6 en fait partie.

Ici, pas de solutions (si ce n’est le site http://www.kaamelott.info/ ) mais qu’en est-il pour les autres programmes indisponibles ?

D’ailleurs, il n’y a pas que ça, comme programme indisponible, nous pouvons également parler de l’offre légale qui n’a quasiment pas évoluée et qui propose encore un catalogue bien léger. Il n’est pas rare de chercher de la musique sur un site qui n’est pas en France et donc, de l’importer. Personnellement, je télécharge avant d’acheter, parce que l’import coûte cher.

Dernier point, qui me semble important. De plus en plus, certains artistes s’opposent à leur public. Puisque l’on parle d’industrie de la culture, il faut voir la chose sous un angle économique : une industrie qui tape sur ses clients les perdra, ils iront ailleurs.

Les récentes altercations entre clients-consommateurs et artistes ne sont bénéfiques à personne, surtout pas aux artistes et il serait temps de leur rappeller que nous ne sommes pas des ennemis et encore moins la cause de leur prétendu manque à gagner (prétendu, en l’absence de preuves entre téléchargement et baisse des ventes).

Le fait est qu’un ensemble de groupes, les fameuses majors, sont posées sur un énorme tas d’or depuis des années, et, bousculées par Internet qui vient changer nos pratiques de consommation, elles se sentent menacées, elles et leur énorme tas d’or.

Ces dernières refusent cependant de bouger, de s’adapter et elle en arrivent même à criminaliser le téléchargement.

Criminaliser le téléchargement, c’est osé tout de même. Télécharger ne tue pas, un pirate (mot mal utilisé, qui sert ici à définir une personne qui télécharge) ne tue pas, il découvre, il partage et surtout, il s’adapte aux outils qui lui sont offerts.

Darwin le disait dans sa théorie de l’évolution… « Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements. »

L’évolution continuera donc, avec ou sans les majors.

#ACTA, la bataille continue.

Oui, c’est bien d’une bataille dont il est question.

ACTA s’attaque à nos libertés individuelles. Je résume rapidement : liberté d’expression sur Internet, liberté d’accéder à des moyens de santé décents en proposant la mort des médicaments génériques et bien d’autres choses que je vous invite à retrouver ici.

C’est bien d’une bataille car ceci ne fait que commencer, ce n’est pas la guerre. Il vaut mieux pour tout le monde qu’elle n’arrive pas. Si tel était le cas, je sais déjà qui en sortirait vainqueur, mais pas sans faire énormément de dégâts.

Je vais vous expliquer pourquoi il m’est important que cette loi soit décapitée, c’est une semi confession et rien n’est exagéré.

Je suis un enfant d’Internet.

J’ai grandi à son contact.

Il était ma fenêtre de sortie lorsque tout était noir hors du clavier, il y a des années de cela. C’était la place ou mon imagination n’avait aucune frontière, aucune barrière, ou je pouvais m’exprimer sans crainte de représailles.

Cela ne veut pas dire que c’était un endroit sans loi, bien au contraire. Il y avait même un certain code, une certaine éthique. Nous nous respections tous les uns les autres (à l’exception des trolls :)).

J’ai grandi avec Internet parce que j’ai appris avec, parce que les cours que j’avais n’ont jamais comblé ma soif de connaissance encore énorme à l’heure actuelle. C’était ma fenêtre sur une culture presque infinie et un partage qui l’était tout autant.

J’ai grandi avec Internet car, tout comme dans la vie réelle, j’y ai fait de belles rencontres et j’ai partagé des idées, des points de vue. J’ai évolué dans ce monde où il règne une anarchie ordonnée.

J’ai rigolé, pleuré, apprécié, aimé, détesté, découvert, partagé, parlé, publié et bien d’autres choses encore. J’ai découvert des artistes qui valent le détour grâce à Internet, j’ai testé et aimé. J’ai acheté. J’ai pu enfin redonner ses lettres de noblesse au mot « Culture », au moment où on essaye de vous faire avaler que la Star ac’ c’est de la Culture.

Bref, je suis un enfant d’Internet. Je ne suis pas le seul, comme on dit… « nous sommes légion ».

Et puis ACTA a pointé le bout de son nez, proposant de tuer définitivement ce partage, cette Culture.

Alors oui, vous comprendrez qu’il est hors de question que cette loi passe, ce serait la fin d’Internet tel qu’on le connait.

Internet n’est pas un lieu sans lois, ce n’est pas le « Far West », c’est quelque chose qui s’autorégule assez bien. Je ne dis pas que la loi n’est pas nécessaire, simplement, elle est à chaque fois disproportionnée. Là où il faut une loi équilibrée pour lutter contre une fourmi, les gouvernements, incités par les ayants-droit, nous proposent une arme nucléaire.

Oui, ACTA, c’est *juste* la loi la plus liberticide qui puisse exister à l’heure actuelle à l’échelle mondiale, bien loin devant SOPA ou PIPA. Elle propose de tuer le « générique » dans le secteur pharmaceutique – je sais, je me répète mais ce point me choque vraiment – et plus encore.

Pour un fichier MP3 téléchargé, elle propose la saisie et la destruction de l’appareil électronique, avec en cadeau bonus une éventualité de fouille.

Vous vous êtes reconnus dans ma façon d’aimer Internet ? Alors réveillez-vous, il est temps de vous battre pour lui.

ACTA arrive et il est certain que si elle passe, il y aura un avant et un après ACTA, lorsque vos FAI deviendront des espions, des « big brothers » en puissance.

Que faire ?

Contactez vos eurodéputés, le traité ACTA sera voté définitivement entre Juin et Septembre, informez les. Dites-leur ce que représente Internet pour vous.

Signez la pétition d’Avaaz contre ACTA, déjà signée par plus d’un million de personnes.

Faites tournez l’info sur Internet, par mail, facebook, twitter et tout autre réseau social. Faites sortir l’information de la toile afin d’informer ceux qui n’ont pas connaissance de ce traité.

Mobilisez-vous, des manifestations sont organisées : une le 11 février dans différentes villes de France et du monde entier, une autre au mois de mars, descendez dans la rue et sensibilisez les gens aux dangers d’ACTA. Des gens se sont battus, autrefois, pour la liberté d’expression. A l’heure où elle existe encore sur Internet, c’est à nous de nous battre pour elle.

Pour terminer sur une petite pointe d’humour (un peu spécial, j’en conviens) :

Fils d’Internet, mes frères
Je lis dans vos données la même peur qui pourrait saisir les miennes
Un jour peut venir, ou le courage des hommes faillira, ou nous abandonnerons Internet et nous briserons tout lien
Mais ce jour n’est pas arrivé.
Ce sera l’heure des ayant-droits et du DPI lorsque l’âge d’Internet s’effondrera
Mais ce jour n’est pas arrivé
Aujourd’hui nous combattrons
Pour tout ce qui vous est cher, sur ces bons octets
Je vous ordonne de tenir, Internautes !

NB : je sais, je me répète mais c’est ainsi 🙂