Où est Charlie ?

Après le renforcement des moyens mis à disposition pour surveiller la population, la mise en place de la Loi de Programmation Militaire (LPM) et la loi sur le terrorisme, le gouvernement revient à la charge, cette fois-ci avec un projet de loi sur le renseignement.

Ce projet de loi dit « Renseignement » propose d’étendre à nouveau les moyens de surveillance de l’État, déjà bien renforcés avec les précédentes lois. L’objectif se veut ambitieux : mettre à jour les règles qui encadrent les différentes pratiques des services de renseignement.

Le principal but de ce projet de loi est, bien évidemment, le renforcement de la sécurité de l’État et de ses concitoyens, à savoir nous.

Est-ce que projet de loi est une bonne nouvelle ? Qu’est-ce que ça représente, concrètement ? Dois-je m’inquiéter, moi, citoyen français ?

C’est ce que votre serviteur va tenter de vous expliquer.

La « police » administrative.

Ce projet de loi propose d’étendre les mesures administratives.

Pour résumer de la façon la plus juste possible, dès lors qu’on touche à nos libertés fondamentales, c’est au juge, seul garant de nos libertés fondamentales, d’intervenir.

Ce projet propose de se passer du juge dans les cas suivants :

  1. L’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale
  2. Les intérêts majeurs de la politique étrangère, l’exécution des engagements internationaux, la prévention de toute forme d’ingérence étrangère
  3. Les intérêts économiques ou scientifiques majeurs
  4. La prévention du terrorisme, des atteintes à la forme républicaine et à la stabilité des institutions, de la reconstitution ou du maintien de groupement dissous
  5. La prévention de la criminalité et de la délinquance organisées
  6. La prévention de la prolifération des armes de destruction massive
  7. La prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique

A la lecture de ces cas, une chose ressort : c’est vaste. Très vaste. Et flou. Tellement que je ne vous cache pas mon inquiétude quant aux moyens qui seront mis en œuvre pour atteindre des objectifs. On décide de se passer du juge sur des cas où sa présence est fortement requise.

D’ailleurs, ces moyens, quels-sont-ils ?

C’est là que j’ai l’impression d’être dans 1984. Non, ne partez pas, lisez jusqu’au bout.

Premier moyen

La CNCTR, pour commission nationale de contrôle des techniques du renseignement. Elle remplace la CNCIS, complètement débordée par la charge de travail. CNCIS qui est composée de trois membres, c’est évidemment trop peu pour agir lorsque les agences de renseignement sortent du cadre de la loi. Cela semble être une bonne nouvelle mais dans les faits, je n’en suis pas certain. Tout dépendra de la façon dont la CNCTR sera utilisée, ainsi que de ses membres et de ses moyens que l’on sait déjà plus importants que ceux de la CNCIS.

Second moyen

Des équipements dont on ne sait rien, installés directement dans les locaux des opérateurs (dont les fournisseurs d’accès à Internet). Ces « boites noires » devront « détecter, par un traitement automatique, une succession suspecte de données de connexion ». Qu’est-ce que cela signifie, en clair ? Que l’État sera capable de capter et conserver l’ensemble des données qui transitent par ces opérateurs. En résumé, il sera donc en capacité de surveiller l’ensemble de sa population et plus encore, puisque nous ne sommes pas les seuls à utiliser ces opérateurs.

La notion de traitement automatique est au moins autant inquiétante. Automatique, ça se traduit assez facilement : tu es un suspect ou tu ne l’es pas. Même si les programmes de traitement automatiques sont crées par des humains, l’informatique reste ce qu’elle est : un outil con qui ne connaît que le vrai ou le faux.

Ce principe est à rapprocher de la théorie des 51% largement abordée dans les différents scandales liés à la NSA et à ses vastes opérations de surveillance à l’échelle du globe : si il y a 51% de chances que tu sois un terroriste, alors, tu es un terroriste. C’est le principe de départ qui justifie la mise en place, partielle certes, mais existante, d’une surveillance. L’informatique n’a pas la finesse d’analyse d’un humain, qui lui-même n’a pas la finesse d’analyse d’un groupe.

En clair : un programme « con » viendra analyser tout ce que vous faites et détectera que votre comportement est peut-être suspect. Dès lors, vous deviendrez quelqu’un « à surveiller ». Pensez-y la prochaine fois que vous vous intéressez un peu trop à un sujet, des cours de chimie, à l’apprentissage d’une langue étrangère ou je ne sais quelle autre activité.

A partir du moment où on installe des équipements directement chez l’opérateur afin de capter des données, on parle de DPI, dixit une Alexandre Archambault, responsable des affaires réglementaires chez Iliad/Free.

Le DPI, je ne reviendrai pas dessus, je crois que je l’ai déjà fait , là et un peu partout sur le blog. Le terme de DPI est connu puisque les pires dictatures du monde s’en servent pour surveiller leurs concitoyens. La France entrera dans la danse, ce projet passera, à n’en pas douter.

Autre point : cette captation de données sera réalisée sans aucun intermédiaire, les agences de renseignements pourront donc se servir « directement », sans rendre de comptes à personne. Pas de juge, pas d’intermédiaires, ça commence à faire beaucoup.

Troisième moyen

La levée de l’anonymat des données. Le projet de loi prévoit que ces données soient anonymisées et, qu’en cas de suspicion, cet anonymat puisse être levé. Dans le même temps, le même projet prévoit que les métadonnées soient, elles aussi, aspirées. Les métadonnées sont des éléments liés à la donnée, sans être la donnée directement : un appel, c’est une donnée. Le numéro qui appelle, celui qui est appelé, le temps de dialogue, les antennes utilisées pour passer cet appel et tout ce qui gravite autour de l’appel, ce sont des métadonnées donc, même si la donnée est anonyme, il est simple de savoir qui se cache derrière.

Petit état des lieux : pas de juge garant de nos libertés, pas d’intermédiaires pour aller collecter les données, pas de réel anonymat, le tout étant géré par des robots, donc quelque chose qui, par définition, est stupide.

Quatrième moyen

Les IMSI catchers. Ce dispositif, qui se place entre un appareil mobile (type téléphone portable) et une antenne relais, permet de capter les données qui transitent. Ce dispositif existe déjà et est déjà utilisé par les services du renseignement français. Le projet propose d’autoriser l’IMSI catcher à collecter « dans certaines conditions, le contenu des correspondances ».

Seul problème : un IMSI catcher ne vise pas une seule personne mais toutes les personnes à proximité du dispositif, ce qui signifie que l’ensemble des données, de l’ensemble des personnes, sera capté, ce qui présente un sérieux problème avec la loi qui garanti le secret des correspondances. D’autant plus que ces données numériques pourront être conservées par l’État, certaines pouvant être conservées plus longtemps qu’actuellement, c’est une autre mesure du projet.

Sans juge, sans intermédiaires, sans anonymat, le tout géré par de la stupidité et avec des données privées de gens qui « étaient là au mauvais endroit, au mauvais moment ».

Cinquième moyen

L’obtention des clefs de chiffrement. Le projet de loi veut en finir avec les connexions et les échanges chiffrés, comme David Cameron au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo. Il propose d’utiliser les moyens mis en œuvre par la loi sur le terrorisme afin de casser un mot de passe d’accès à une messagerie, la clef de chiffrement d’une adresse mail ou tout système de chiffrement qui lui fera obstacle.

A titre d’information, dans https, le « s » est là car votre connexion est chiffrée. Certains logiciels de communication sont également chiffrés et avec les « révélations Snowden », de plus en plus d’opérateurs activent le chiffrement des données par défaut.

Qu’est-ce qui arrivera si vous chiffrez vos échanges, comme des mails par exemple ? A mon avis, vous ferez grimper le « terroriste-o-mètre », souvenez-vous, les 51% …

Mais, personne n’est contre ?

Ohhhhh, si, bien entendu :

  1. La CNIL fustige le projet sur le renseignement : « Les garanties prévues pour préserver les droits et libertés ne sont pas suffisantes pour justifier une telle ingérence »
  2. Le Conseil National du Numérique déglingue le projet : « De plus, le Conseil est préoccupé par l’introduction de nouvelles techniques de renseignement, dont certaines peuvent confiner à une forme de surveillance de masse. »
  3. L’ordre des avocats de Paris s’inquiète : « Projet de loi  sur le renseignement : opacité et danger pour les libertés ? »
  4. La Quadrature du Net s’oppose au projet : « Renseignement : désastreuse dérive du gouvernement Valls sur la surveillance !« 
  5. Le syndicat de la Magistrature de dit « préoccupé », sur Numerama.

J’en passe mais citons aussi le CSM, des associations, des hackers, des experts connus et reconnus, Reporter sans Frontière, la FIDH et bien d’autres, qui s’inquiétaient déjà lors des précédentes lois… Et j’oubliais la Cour de Justice de l’Union Européenne, qui a déjà tapé sur la France en raison de certaines dispositions de surveillance, considérées comme insatisfaisantes car dangereuses pour la protection de la vie privée.

Côté couverture nationale, comme internationale, ce n’est pas très beau à lire, dans le Washington Post, sur Techdirt qui n’y va pas de main morte, puis sur l’Obs, 01Net parle clairement d’un « Patriot Act » à la française, chez Reflets (ou se côtoient journalistes, hackers et hacktivistes)… même la BBC en parle, alors que le Royaume-Uni n’est pas un modèle de protection de la vie privée.

Mon avis

Bah oui, parce que c’est un peu mon blog, quand-même.

Souvenez-vous d’un billet précédent sur la dérive de l’État sécuritaire, ou lisez-le. Dans ce billet, j’avais pris la vision la plus négative et la plus sombre possible pour l’avenir et croyez-le ou non, j’ai tendance à voir les choses en noir assez souvent… j’étais loin d’imaginer que ce projet puisse ne serait-ce qu’être souhaité par quelqu’un.

Comment est-il possible, en moins de deux mois, de passer de « Je suis Charlie », symbole malgré lui de la liberté d’expression, à « Je vais doter mon pays d’un outil capable de mettre toute ma population sous surveillance comme dans les grandes dictatures » ?

Car c’est bien de dictature, ou d’état sécuritaire, ou peut-être d’état policier dont il est question, mais plus de démocratie.

Je déclarais, il y a peu : « Un état sécuritaire, c’est un des pouvoirs qui donne la priorité, de façon excessive, à la sécurité. Il bascule peu à peu dans une logique d’augmentation des moyens de surveillance, de contrôle et de répression. Dans les pires situations, cette dérive vers un état sécuritaire mène à la dictature.« , je crois que ce projet de loi est une bonne représentation de la direction que nos élites veulent faire prendre à notre pays.

A ce titre, je vous invite à lire le très bon « Qu’est-ce que la démocratie ?», qui fait le rapport avec la loi Renseignement.

Le projet de loi est lisible ici, si vous le souhaitez. Et vous le souhaitez, au moins un peu. Si si. J’insiste.

.@Bcazeneuve, l’effet cigogne et la cybersurveillance

« 90% de ceux qui s’engagent dans des opérations terroristes s’engagent après avoir consulté des sites sur Internet »

Bernard Cazeneuve, Ministre de l’intérieur.

Ainsi s’exprimait M. Cazeneuve lors des dernières « QAG », la séance des questions au gouvernement. La réponse est faite suite à une question du député Galut sur les dispositif de cybersurveillance dans la lutte anti-terroriste et anti-criminalité. Si vous avez un doute sur la citation, vous pouvez la retrouver ici (à partir de 41 minutes 55 secondes), difficile de faire plus officiel comme source.

Mais, M. Cazeneuve, malgré tout le respect que je me dois de lui porter… qu’est-ce qui lui passe par la tête bordel !?

Étudions sa déclaration.

Il a raison. 90% de ceux qui s’engagent dans des opérations terroristes s’engagent après avoir consulté des sites sur Internet.

Sinon :

  • 90% des étudiants se servent d’Internet pour faire leurs recherches.
  • Plus de 50% de la population s’en sert pour simplement communiquer.
  • Plus de 80% des administrations françaises se servent d’Internet au quotidien.

Au mieux, sa déclaration est l’expression d’un raccourci douteux, au pire, elle est la représentation d’une mauvaise foi doublée d’une incompréhension totale sur le sujet, ce dont je doute, cet homme est intelligent, il sait parfaitement ce qu’il déclare. Ce qui est pire.

Oui, les terroristes utilisent Internet. Comme lui, moi, ou même vous qui lisez ce blog. Comment ne pas le faire ? C’est un média incontournable, même pour un terroriste en puissance.

Cette déclaration est donc vide de sens.

C’est « un effet cigogne » : elle mélange volontairement corrélation et causalité. Pour celles et ceux qui se demandent ce que c’est, démonstration :

Dans les communes qui abritent des cigognes, le taux de natalité est plus élevé qu’ailleurs. Les cigognes apportent donc les bébés…

En réalité, les cigognes sont généralement en campagne et dans les petits villages, où le taux de natalité est plus élevé qu’en ville. Il y a donc une corrélation entre deux phénomènes, sans que l’un ne soit responsable de l’autre. Donc, pas de causalité

Bernard Cazeneuve à décidé de prendre ce chemin dans ses déclarations et c’est bien dommage, car il sous entend à demi-mots qu’Internet est plus ou moins responsable du terrorisme. C’est ainsi qu’il compte, lui aussi, diaboliser Internet pour pouvoir proposer un nouvel arsenal législatif. Arsenal dont il parlera, à la fin de la réponse au député Galut.

M. Cazeneuve déclarera d’ailleurs « nous avons également sur Internet énormément de propos qui sont tenus, notamment sur des réseaux sociaux, qui sont  des propos racistes, antisémites qui sont tenus d’ailleurs sans qu’il n’y ait de régulation » …

Oublions un peu le discours à deux ronds et analysons-le : régulation de l’ensemble des communications afin qu’il n’y ait plus de propos racistes ou antisémites. Techniquement, Cazeneuve exprime cela, non ? Puisqu’il semble s’étonner qu’il n’y ait pas de régulation de ces propos.

D’ailleurs, cette déclaration, c’est faux. Il existe une régulation de ces propos et la loi les concerne aussi. Elle s’applique simplement après les faits. La scène de théâtre jouée par Cazeneuve lui permettra, le moment venu, de demander un contrôle a priori des propos tenus sur Internet, ce qui est tout bonnement impossible, sauf à basculer dans un système où la liberté d’expression n’est plus tant une liberté que ça.

Moins d’un mois après les attentats que nous avons tous en tête, c’est osé, pour ne pas dire déplacé.

Angleterre : et si c’était la fin des communications privées ?

C’est l’idée suggérée aujourd’hui par le premier ministre anglais, David Cameron.

Cette réaction fait suite aux drames dans les locaux de Charlie Hebdo, à celui de Montrouge et dans ceux d’une épicerie casher, où les victimes étaient juives.

« Dans notre pays, voulons-nous autoriser un moyen de communication entre les gens, que même dans les cas extrêmes avec un mandat signé personnellement par le ministre de l’intérieur, nous ne puissions pas lire ? »

– David Cameron, premier ministre anglais. –

Dans une société qui prend peu à peu conscience de l’ampleur de la surveillance des communications, cette déclaration fait l’effet d’une petite bombe qui, j’imagine, sera pourtant saluée par de nombreuses personnes.

Ma résolution de 2015, c’est d’écrire le plus souvent possible avec la tête froide, nous allons donc analyser les propos du premier ministre anglais.

Dans un monde « post-Snowden » où de plus en plus d’entreprises chiffrent directement leurs communications et celles de leurs clients, cette déclaration est brutale. Il faut se demander si les moyens proposés par Cameron sont réellement justifiés et adaptés.

Et, à mon avis, la réponse est non.

Il va de soi qu’il faut faire quelque chose et j’ose penser que vous serez d’accord avec moi. Cependant, cela ne doit pas se faire au détriment de la liberté qu’à chacun de pouvoir chiffrer ses communications afin de protéger un peu ses données personnelles et son intimité.

Nous pouvons également remettre en doute l’efficacité des moyens suggérés par Cameron. La traque aux terroristes, c’est un peu comme le jeu du chat et de la souris : lorsque le chat est assez compétent pour traquer la souris, cette dernière a déjà mis au point une autre technique pour ne pas se faire attraper.

J’ai déjà eu l’occasion de « traquer » des délinquants sur les Internets, des pédophiles aussi, et une chose est sûre : si le fait de chiffrer ses communications devient illégal, les terroristes & Co. iront voir ailleurs, plus loin, plus profondément dans les tréfonds des Internets.

A ma connaissance, la majorité de la population en capacité de protéger ses communications n’a pas l’envie de tuer son prochain, alors pourquoi vouloir appliquer quelque chose d’aussi violent à l’ensemble de ladite population ?

L’Angleterre, et Cameron en particulier, est connue pour sa politique de surveillance extrêmement étendue et, pour être moi-même anglais, je sais exactement de quoi je parle. La surveillance, c’est un des fers de lance de Cameron, comme ça l’est pour Nicolas Sarkozy ici.

Dans les faits, Cameron « surfe » sur un acte assez rare dans « notre bonne vieille Europe » et odieux pour justifier des choses qui, normalement, ne pourraient pas arriver. Il profite de l’instant et sans doute de l’émotion pour proposer le pire car, littéralement ou presque, le monde entier est en émoi.

Je doute que de telles déclarations, dans un climat aussi compliqué, soient une bonne chose.

S’il marque un point en déclarant qu’il faut faire quelque chose, sa proposition doit être modérée et analysée avec énormément de recul : Cameron est en campagne, les prochaines élections auront lieu au plus tard avant mai 2015 et David Cameron représentera le parti conservateur, en perte de vitesse face au parti UKIP, très nationaliste.

Cameron n’hésitera d’ailleurs pas à déclarer que « ceci arrive dans des cas extrêmes », alors que dans un même temps les lois anglaises sont extrêmement intrusives, sans pour autant être efficaces.

Résumons donc : Cameron a fait une déclaration, il souhaite interdire le chiffrement des communications, au titre de la protection de la nation. Ses déclarations font suite à des attentats et il « profite » de l’instant pour proposer quelque chose de totalement incohérent et disproportionné.

Espérons que ces déclarations ne restent que des déclarations… déclarations que vous pouvez regarder ici (en anglais)

Photos : quand Google referme un peu plus (encore) son système.

La nouvelle peut sembler anodine, d’ailleurs, vous ne l’avez peut-être pas remarqué, mais Google a modifié un peu sa politique de traitement et de stockage des photos.

En effet, depuis la dernière grosse mise à jour du système Android, aka Lollipop, il est nécessaire d’avoir l’application Google+ pour pouvoir utiliser sa galerie photo.

C’est d’ailleurs pour cette raison que ce point a peut-être échappé à bon nombre de personnes qui, par défaut, n’ont pas désactivé l’application. Il ne semble pas nécessaire d’avoir un compte Google+, du moins, pas pour l’instant.

Si vous êtes dans mon cas, et sur une version officielle ou très spécifiquement modifiée d’Android, vous avez dû avoir ce magnifique message :

L'application "photos" et Google+ ...
L’application « photos » et Google+ …

C’est clair et précis et cela ne se produit que si vous avez désactivé Google+, ou si vous n’avez pas l’application sur votre périphérique, ce qui est mon cas.

J’ai quand-même pu bricoler un peu, pour au moins passer à l’écran suivant :

Combien de personnes vont lire ça ?
Combien de personnes vont lire ça ?

Google laisse donc le choix d’activer ou non la synchronisation des photos sur Google Drive, sa solution « cloud ». Bien entendu, Google ne manque pas de vanter son service, comme le montre la copie d’écran précédente.

Je doute cependant que beaucoup de gens fassent attention à cet écran, c’est la même chose pour les conditions générales d’une application, tout le monde clique sur « je suis d’accord », sans pour autant lire le contenu, ce qui donne des cas intéressants à analyser.

Reprenons donc : Google force ses utilisateurs à passer par l’application « photos », qui remplace l’ancienne galerie. Il propose également d’activer ou non la synchronisation sur le cloud, en sachant que plus de 90% des utilisateurs ne lisent pas et cliquent sur « OK ».

Le tout dans une période assez mouvementée pour la sécurité de nos données privées sur Internet… 2014 a connu des photos de stars nues, des failles de sécurité sur SnapChat, plus d’une faille de sécurité chez Orange avec la fuite de données personnelles, un groupe américain qui a réussi à se faire voler plus de 11 To de données et j’en passe..

Est-ce un choix judicieux ? Selon moi, non. Le monde, du moins, une plus grande partie du monde qu’avant, prend conscience qu’il faut protéger ses données et là, Google va dans le sens inverse de la logique.

Proposer de lier son compte Google+ à ses photos, pourquoi pas. Proposer de publier automatiquement ses photos sur Google+, c’est assez dangereux mais pourquoi pas…

Là, nous avons un Google qui vous impose d’avoir une application activée, sous peine de vous bloquer un accès, et pas le plus petit. Le réflexe photo depuis le téléphone portable est devenu une habitude.

Google se referme un peu plus, après avoir capté une part extrêmement importante d’utilisateurs à grand coup de « chez nous, c’est ouvert et libre ». Pour une raison qui m’échappe, il force le passage de Google+, c’est peut-être un moyen de forcer la création d’un compte pour faire vivre ce réseau social ?
Quoi qu’il en soit, je trouve que c’est une mauvaise décision, elle peut sembler vraiment insignifiante pour vous, mais pour moi ce n’est pas le cas, c’est une restriction… et je n’aime pas les restrictions.

On pourra me dire : « oui mais tu as telle application qui fait presque pareil », « oui, mais il y a f-droid, tu peux récupérer une application similaire ». C’est vrai, vous avez raison. C’est d’ailleurs ce que j’ai fait, j’ai au moins accès à ma galerie de photos, même si je ne peux plus les modifier comme avant.

Mais quid des « autres » ?

De ceux qui n’ont peut-être pas la connaissance nécessaire pour réaliser l’opération? De celles et ceux qui ne sont pas des petits geeks et qui peuvent se sentir mal à l’aise avec un téléphone ?

C’est ça, mon inquiétude, pas mon intérêt, mais l’intérêt général… et là, je dois avouer qu’il est un peu abimé par Google.

ps : une fois dans l’application « photos », parce qu’en bricolant vraiment un peu, j’ai réussi à rentrer dedans sans disposer de l’application Google+, bien, c’est un peu le désert… il semble impossible d’éditer de photos ou de rajouter des filtres si Google+ n’est pas présent, je peux simplement recadrer mon image et la couper.

Courier : l’application sécurisée qui aide à contourner la censure.

The Guardian Project vient de mettre en ligne une nouvelle application pour smartphones : Courier.

Courier est un lecteur de flux RSS, mais pas forcément très classique : il embarque un certain nombre d’outils dédiés à la protection de vos données, votre vie privée, la sécurité … et il permet de contourner la censure installée çà et là dans les Internets, afin de permettre à ceux qui subissent cette censure d’accéder à ce qui est bloqué.

Je l’ai testé et, premier point positif, il n’y aura pas de copies d’écran : l’application verrouille cette fonction, tout comme la prise de vidéo d’ailleurs.

Au démarrage de l’application, on vous demande une phrase de passe qui permet de chiffrer vos données, vous tombez ensuite sur une petite présentation de l’application ainsi que sur un « panic buton », un bouton qui permet de supprimer l’ensemble des données de l’application ou mieux encore, désinstaller l’application.

A ce sujet, après avoir testé, je trouve que cette fonction n’est pas encore aboutie car on bascule sur le gestionnaire d’applications android, qui demande si on veut bien désinstaller l’application. C’est un fonctionnement parfaitement normal, mais du coup le bouton panique perd de son intérêt.

Ensuite, point que j’ai trouvé bien fait, l’application est entièrement configurable, on peut choisir de passer par le réseau Tor ou pas, de diffuser des informations via courier ou pas, de communiquer hors de l’application, de diffuser des informations via le réseau Wi-Fi ou bien encore de partager l’application via un réseau Wi-Fi aussi.

Côté réseau, l’application est plutôt bien optimisée, ce qui est fort agréable surtout lorsque le réseau est un peu en carton…

Bien évidemment, l’application permet de rajouter ses propres flux RSS, bien qu’elle en propose quelques-uns par défaut.

Côté passe de phrase, c’est assez poussé : il est possible de configurer un temps d’expiration pour la phrase de passe et de configurer un kill password : une phrase de passe qui efface l’application ainsi que ses données. C’est pratique pour ceux qui risquent leur vie rien qu’en lisant des informations interdites, même si ça semble peut être fou pour quelques personnes.

Enfin, côté langues, Courier est disponible en anglais, chinois, tibétain, ukrainien et russe. Ces choix peuvent sembler étranges mais ils correspondent, selon moi, à des besoins actuels, la Russie et les autres n’étant pas des modèles de liberté d’information…

Dans les fonctionnalités que j’aimerais voir dans une prochaine mise à jour, il y a celle des flux en https. L’application ne fait pas elle-même de recherches sur le https des flux ajoutés en http, en résumé : si vous ajoutez un flux en http, il restera en http et courier n’ira pas chercher le https (si vous utilisez l’application et que ça fonctionne chez vous, prévenez-moi, c’est peut-être un bug chez moi).

Bref, je ne peux que vous inviter à au moins tester l’application, et à l’adopter si vous l’appréciez !

Enfin, l’application étant encore en beta (v 0.1.8 actuellement), n’hésitez pas à remonter des bugs ou des fonctionnalités que vous souhaitez voir dans de prochaines versions, The Guardian Project disposant d’un système de remontée de bugs

CAFAI, le F.A.I dont vous êtes le héros, épisode 2.

J’avais rédigé un petit truc, il y a un temps, sur C.A.F.A.I, un fournisseur d’accès à Internet neutre qui fait partie de la Fédération French Data Network (FFDN).

Les F.A.I neutres sont des associations, composées de membres, qui sont en capacité de proposer un accès à Internet, le « vrai Internet », pas la cam’ que les gros F.A.I vous refourguent.

Ces F.A.I fournissent un accès à Internet neutre. Pour rappel, la neutralité des réseaux est la pierre angulaire des Internets tels que vous les connaissez, pierre donc voici quelques principes (source) :

  • transmission des données par les opérateurs sans en examiner le contenu ;
  • transmission des données sans prise en compte de la source ou de la destination des données ;
  • transmission des données sans privilégier un protocole de communication ;
  • transmission des données sans en altérer le contenu.

En résumé, un F.A.I neutre… c’est un fournisseur qui respecte sa propre définition : un fournisseur d’accès à Internet, point.

Son rôle c’est juste de vous fournir des tuyaux, à la bonne taille, contre rémunération.

Sauf que, dans les faits, nos opérateurs sont plus des « F.A.S », des fournisseurs d’accès à des services, généralement les leurs, au détriment du reste d’Internet.

Ces fournisseurs d’accès piétinent la neutralité du Net en développant des modèles économiques discriminants, ils favorisent tel site par rapport à un autre, interdisent tel ou tel protocole et tous ont pour ambition d’aller encore plus loin : faire des offres « à tiroir » où il sera possible de monnayer l’accès à n’importe quel site web, protocole ou service.

Tous ? Non. Une bande de gus dans un garage plus si petit que ça défend toujours la neutralité du net, ils sont regroupés en associations et proposent un accès à Internet neutre.

Mais pour se faire, ils ont besoin de membres, de visibilité, de nous.

Et c’est là que la magie d’Internet, de nous donc, entre en jeu.

Pour que C.A.F.A.I puisse exister, comme les autres fournisseurs d’accès Internet associatifs, il leur faut un peu de visibilité, un peu plus que l’actuelle qui consiste à partager l’information entre gens « qui savent ». Il faut donc faire circuler l’information afin qu’elle touche un public plus large, c’est le but de ce billet.

Le second point, c’est qu’un F.A.I associatif à besoin de gens, d’adhérents, pour exister. C’est comme une entreprise qui n’existe que parce qu’elle a des clients, sauf que là, c’est bien mieux, c’est votre F.A.I, un fournisseur où vous pouvez participer, interagir, agir tout court. Alors, si vous avez du temps, de l’énergie et l’envie d’apporter votre contribution à un monde meilleur, n’hésitez pas.

Le dernier point, c’est que les abonnements sont ouverts chez C.A.F.A.I, et c’est là que ça se passe.

Vous pouvez retrouver le site de l’association ici : https://cafai.fr.

Si vous souhaitez les joindre par mail, vous pouvez le faire sur contact (at) cafai.fr.

CAFAI dispose aussi d’une mailing-list, vous pouvez demander à vous inscrire à cette dernière.

CAFAI dispose également d’un salon Jabber : cafai (at) chat.cafai.fr.

N’hésitez pas à les faire connaitre, reprenez ce billet ou partagez-le, ça ne pourra que leur faire du bien.

Pour finir, pour celles et ceux qui n’habitent pas en Champagne-Ardenne, la Fédération FDN est implantée çà et là, un peu partout en France, plus d’informations ici.