Dans quelques heures, la loi sur le renseignement sera votée, puis le conseil constitutionnel sera saisi par la représentation nationale.
Hier, Wikileaks a commencé à diffuser des documents liés à la France et aux décisions des chefs du gouvernement sur divers sujets.
Dans une délicieuse actualité, les documents de Wikileaks attestent de la surveillance des trois derniers présidents de la république, à savoir Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande.
La NSA invoque la protection de la sécurité nationale pour justifier la mise sous surveillance de ces trois personnes. Ned Parker, porte parole du conseil de la sécurité nationale, a déclaré :
« Nous n’avons pas visé et ne viserons pas les communications du président Hollande. Comme nous l’avons déjà indiqué, nous ne menons pas d’opérations de surveillance à l’étranger sauf s’il existe un objectif de sécurité nationale spécifique et validé. Cela s’applique aux citoyens et aux dirigeants. Nous travaillons étroitement avec la France sur toutes les questions internationales importantes et les Français sont des partenaires indispensables. »
Résumons donc : la NSA se fiche complètement du status d’une personne, président ou pas, elle surveille qui elle juge nécessaire pour la « protection de la sécurité nationale ».
De son côté, le gouvernement se dit « choqué » et « outré par les pratiques de la NSA » et par cette surveillance :
«Le Conseil de Défense réuni ce jour a examiné la nature des informations diffusées hier soir par la presse, portant sur la période 2006-2012 et qui concernent le comportement de la NSA.
Il s’agit de faits inacceptables qui ont déjà donné lieu à des mises au point entre les Etats-Unis et la France, notamment fin 2013 au moment des premières révélations et lors de la visite d’Etat du Président de la République aux Etats-Unis en février 2014.
Des engagements avaient été pris par les autorités américaines. Ils doivent être rappelés et strictement respectés.
La France, qui a encore renforcé son dispositif de contrôle et de protection, ne tolèrera aucun agissement mettant en cause sa sécurité et la protection de ses intérêts. »
Source : http://www.elysee.fr/communiques-de-presse/article/conseil-de-defense-8/
Il est plaisant, du moins assez drôle, de lire ces déclarations alors que la loi sur le renseignement va être votée, d’ici quelques heures.
Pourquoi ?
Première raison
L’invocation de la sécurité nationale. Il suffit d’invoquer cette sécurité pour justifier à peu près tout et n’importe quoi, cette finalité étant assez vaste pour faire, à peu près à nouveau, tout ce qu’il est possible de faire.
C’est d’autant plus drôle que la loi sur le renseignement prévoit exactement la même chose, puisque dans les finalités qui autorisent la mise en place d’une surveillance, on trouve, en tête des raisons, la fameuse « atteinte à la sécurité nationale ».
Seconde raison
La loi sur le renseignement n’est pas une loi qui s’applique uniquement à la protection des intérêts français. C’est également une loi qui permet la promotion desdits intérets.
L’article 10 de la loi sur le renseignement crée une excuse pénale pour les agents des services. Ces derniers ont carte blanche pour pirater ce que bon leur semble, tant que leurs activités s’incrivent dans une des finalités du renseignement. Ils pourront donc pirater, récupérer des données de n’importe quelle manière, effacer ou copier n’importe quelle chose sans craindre de poursuites.
Bref, comme la NSA et le Patriot Act américain.
Voir Jean-Jacques Urvoas délarer…
Et une nouvelle fois nous redécouvrons que les Etats-Unis n’ont pas d’alliés, ils n’ont que des cibles ou des vassaux. #NSA
— Jean-Jacques Urvoas (@JJUrvoas) 23 Juin 2015
C’est assez déplacé, pour ne pas dire grotesque, pour ne pas dire « Oui, Jean-Jacques nous prend vraiment pour des gros cons. »
Sachant que la loi renseignement permet ce que le gouvernement français reproche au gouvernement des Etats-Unis, sachant que Jean-Jacques Urvoas est le papa de la loi sur le renseignement, sachant que le motif invoqué, à savoir la « sécurité nationale », sert déjà de faux prétexte pour justifier certaines actions des services de renseignement, le pseudo choc de la classe politique est un énorme « allez-vous faire foutre » au peuple français.
Notre représentation politique juge inacceptable cette surveillance mais, dans le même temps, instaure exactement la même sur son propre territoire, en visant son propre peuple.
C’est une insulte au droit à la vie privée dont bénéficie, en théorie, chaque citoyen. Manifestement, ces personnes se pensent au dessus de nous, la plèbe.
J’ai hâte de voir la suite des révélations de Wikileaks…
Une réflexion sur « Le Président, la NSA, la loi renseignement et moi. »