Chers représentants, représentantes, députés,
D’ici quelques jours, vous serez amenés à vous prononcer sur le projet de loi sur le renseignement et je souhaite, avant l’ouverture des débats, que vous preniez la mesure de ce que vous allez voter.
Pour commencer, j’ai conscience de n’être qu’un « simple citoyen », de ne pas disposer de la science infuse, d’être peut-être « à côté de la plaque ».
Eux en revanche, ils ne le sont pas :
- Amnesty International
- La Quadrature du Net
- Alain Marsaud, ancien juge du terrorisme
- Le Conseil National du Numérique
- La CGT Police
- Reporters Sans Frontières
- Le Syndicat de la Magistrature, qui estime que ce projet de loi « « installe un dispositif pérenne de contrôle occulte des citoyens dont il confie au pouvoir exécutif un usage quasi illimité. Il est à ce titre inacceptable. Seul un véritable contrôle a priori de techniques de renseignement proportionnées et visant un objectif strictement défini relevant de la sécurité nationale, restera respectueux des droits fondamentaux. »
- Marc Trevidic, l’actuel juge antiterrorisme
- Le président de la CNCIS lui-même
- La CNCDH (Commission consultative en charge des droits de l’Homme)
- La Ligue des Droits de l’Homme
- L’Union des Syndicats de la Magistrature
- La Fédération Syntec
- Le commissaire des droits de l’Homme du Conseil de l’Europe
- La CNIL
- Human Rights Watch
Que faites-vous de ces avis ? Considérez-vous ces gens comme des « paranos » ?
Pour continuer, je ne suis ni votre ennemi ni celui de la protection de la nation, de ses intérêts, du peuple, de ses enjeux et j’en passe. S’il vous plaît, ne tombez pas dans la logique binaire actuelle : ce n’est pas parce que je m’oppose au projet de loi du renseignement que je suis pour le terrorisme, ce sont deux choses différentes, la vie n’est pas blanche ou noire. Vous le savez j’imagine…
Vous êtes des représentants de la nation et, à ce titre, vous avez choisi de représenter le peuple français, quelles que soient vos convictions, vos couleurs et votre appartenance politique, je ne vous demande qu’une chose : représenter le peuple français. J’ai aussi conscience qu’ici, je ne m’exprime qu’en mon nom, rassurez-vous, j’ai les pieds sur terre.
Nous sommes tous d’accord : ce qui s’est passé au mois de janvier est horrible, immonde, inhumain… faut-il pour autant céder à la dérive sécuritaire actuelle ?
Mesdames et messieurs les députés, notre pays repose sur deux piliers : la séparation des pouvoirs et une devise, inscrite partout : Liberté, Egalité, Fraternité.
Le projet de loi sur le renseignement est diamétralement opposé à cette liberté, c’est une menace pour nos libertés individuelles. Mesdames et messieurs les députés, ce projet de loi sur le renseignement est une boite de Pandore que je vous invite à ne pas activer, à ne surtout pas ouvrir.
Ce projet de loi s’oppose à la séparation des pouvoirs, véritable socle de nos démocraties occidentales. Cette séparation des pouvoirs, vous savez, cette chose théorisée par Montesquieu, ce qui est devenu par la suite le socle absolu de notre démocratie. Montesquieu a simplement déclaré qu’il n’était pas possible de laisser tous les pouvoirs entre les mêmes mains.
En choisissant de se passer totalement de l’autorité judiciaire, le projet de loi sur le renseignement détruit le fragile équilibre entre ces pouvoirs. Vous pourrez rétorquer qu’un juge est prévu, mais c’est un juge administratif et non un juge judiciaire, seul garant des libertés individuelles.
Mesdames et messieurs les députés, généraliser le recours administratif, c’est tuer les fondements de notre démocratie. De la même manière, l’instauration de « boites noires », vous le savez, vous l’avez forcément lu, vu, entendu quelque part, c’est se doter d’un système de surveillance généralisée, ce qui va à l’encontre de la démocratie et, d’un point de vue légal, des dispositions européennes.
Vous déclarerez ne pas vouloir l’utiliser ainsi. Vous déclarerez vouloir nous protéger, comme la NSA l’a fait aux Etats-Unis d’Amérique.
Je pense que vous connaissez la suite…
Mesdames et messieurs les députés, je pense que, quoi que je dise dans cette lettre, cela ne changera pas votre décision.
Souvenez-vous seulement que, lorsque vous voterez ce texte, ce sera en votre âme et conscience.
Malgré l’avis des ONG.
Malgré les nombreux avis d’experts.
Malgré les avis de deux juges de l’antiterrorisme.
Malgré l’avis de la CNCIS.
Malgré l’avis de la Ligue des Droits de l’Homme
Malgré les avis de nombreux citoyens.
Malgré l’avis de tant d’autres….
Mesdames et messieurs les députés, n’ouvrez pas cette boite de Pandore.
épinglé ici : http://gauchedecombat.net/2015/04/07/vous-avez-dit-pjlrenseignement/