Expliquer que protéger son intimité et sa vie privée, c’est important, ça n’a pas fonctionné.
Expliquer très sérieusement une fois et plus simplement une autre fois que « si, nous avons tous quelque chose à cacher » n’a pas non plus fonctionné.
J’en viens à me demander si quelque chose fonctionne pour, à minima, faire comprendre que nous sommes potentiellement surveillés.
Le monde vient justement d’en parler et de faire une magnifique explication vidéo, en patates, j’ai souhaité le faire à l’écrit et avec quelques explications supplémentaires.
Tout commence avec le paradoxe de Milgram, ou pour résumer :
« Ah, comme le monde est petit. »
En fait, sans le savoir, vous connaissez tout le monde. Plus exactement, vous connaissez quelqu’un qui connait quelqu’un, qui lui-même connait quelqu’un qui connait quelqu’un. Quatre fois, oui.
Le paradoxe de Milgram est une théorie qui explique, en résumé, que chaque individu est relié à n’importe quel autre individu par l’intermédiaire de six autres personnes maximum. Cette théorie, bien que fermement critiquée, me semble assez vraie. Il faut savoir que de récentes réflexions avec l’ajout de la variable « réseaux sociaux » font passer cette chaine de contact à 4, d’où les quatre.
Exemple fictif : maillon n°1 connait un journaliste très connu, qui lui-même, maillon n°2, connait une femme dans le milieu de la politique, qui elle-même, maillon n°3, est proche du président de la république et ainsi de suite. Ainsi, il n’est pas faux de dire qu’un ami connait un ami qui connait le président de la république.
Il est possible d’aller très, très loin avec cette réflexion, dans ma région par exemple, tout le monde connait quelqu’un qui connait quelqu’un qui fait passer du champagne en douce, si j’étais du service des douanes, cette information serait d’une grande importance pour moi car cela me permettrait de très rapidement cartographier un groupe d’individus.
Sans aller jusqu’au bout de l’exemple fictif, vous connaissez au moins une personne qui connait (bref vous avez compris la suite) qui :
- pirate des œuvres sur Internet
- revend ou consomme de la drogue
- est proche d’un milieu observé par les services d’un pays
- est proche d’un milieu extrême dans la sphère politique
- a voyagé dans un pays du moyen orient
- est un hacker. Ne nous étalons pas sur la définition de ce mot et, une fois n’est pas coutume, allons chercher la définition des médias : des gens dangereux. (oui, il y a fort à parier que la réflexion n’aille pas plus loin que ça dans les services de renseignement des états : être avec eux c’est être gentil, refuser de l’être c’est être méchant)
Bref, réfléchissez-y bien et gardez bien ce schéma en tête, de plus en plus vrai avec la progression des réseaux sociaux qui interconnectent les humains bien plus rapidement et bien plus largement que via le monde physique.
Maintenant que ce point est expliqué, réfléchissons un peu à la façon dont la NSA fonctionne. D’ailleurs, arrêtons de ne parler que de la NSA, les autres font pareil. Si la France ne va pas hurler et demande une vraie instruction et de véritables comptes au gouvernement américain, c’est parce qu’elle fait exactement la même chose.
Donc, méthode de réflexion : espionner quelqu’un qui se méfie un peu ou qui fait attention, ce n’est pas simple, puis ça force à espionner plein de personnes aussi. Autant espionner des intermédiaires, les fameux « degrés de séparation » entre deux contacts.
Les avantages sont nombreux : ces points de contact récupèrent des informations, de petites informations certes, mais beaucoup d’informations. D’ailleurs, ces personnes connaissent peut-être d’autres personnes qui doivent être surveillées.
Si je veux avoir les informations médicales de beaucoup de personnes, je ne vais pas aller chercher dans la vie de chaque cible, je vais taper dans les dossiers du médecin traitant, logique, non ? C’est exactement la même chose ici.
Donc, allons surveiller et espionner ces personnes, ces « degrés de séparation » si vous préférez. Sauf que le degré de séparation, c’est potentiellement vous et vous n’en avez même pas conscience.
Dans un dernier exemple, imaginons que je sois une personne dangereuse, activement surveillée par les services secrets français. Le simple fait de passer sur mon blog vous rend suspects. Le simple fait de m’envoyer un message, qu’il soit public ou privé, sur n’importe quel réseau, vous rend suspect.
Alors ne parlons même pas d’un mail, ou pire encore : un mail chiffré. Non, pire encore : un mail chiffré à un niveau de chiffrement interdit…non, imaginons simplement les gens qui me connaissent derrière cet écran tiens, ça ne demande pas de compétences spécifiques ça. Ca concerne donc tout le monde.
Potentiellement, vous êtes surveillés par un service quelconque, qui cherche à récupérer des informations.
Sans tomber dans la paranoïa pour autant, pensez-y la prochaine fois que vous allez déclarer « je n’ai rien à cacher ».
Argument supplémentaire intéressant 🙂 Je l’avais déjà lu récemment je sais plus où…
Sinon, pour le « tel argument n’a pas marché, tel autre non plus » : heu, si, ils fonctionnent. Le truc c’est que si tu cherches *un* argument ultime qui marche pour tout le monde et qui ferme sa gueule à tout le monde en une phrase, bah ça n’existe pas. Chacun pense différemment, à des informations, des connaissances, un fonctionnement, des idées différentes, et on convainc chaque personne différemment, avec des arguments pas pareils.
Je suis un grand partisan de la vie privée, mais je ne vois pas l’argument exposé ici. Si je résume ce que j’ai compris du texte en une phrase : « Vous êtes espionnés même si vous n’avez rien à vous reprocher parce que vous êtes potentiellement en contact avec des personnes qui ont des choses à se reprocher ». Ce n’est absolument pas un contre argument au fameux « je m’en fiche d’être espionné car je n’ai rien à me reprocher », qui part de la même base : tout le monde est espionné. La question à laquelle on se doit de répondre est « Pourquoi ça devrait vous inquiétez de vous savoir espionné » et non pas « Pourquoi vous espionne-t-on ».