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QSPTAG #318 — 21 février 2025

Fri, 21 Feb 2025 18:01:06 +0000 - (source)

VSA : le gouvernement veut encore prolonger « l’expérimentation » de deux ans

Il y a parfois des embouteillages dans le calendrier. Fin janvier, nous avons gagné le contentieux qui nous opposait à la commune de Moirans : le logiciel Briefcam qu’elle utilisait pour surveiller les rues de la ville était reconnu comme étant illégal par le tribunal administratif. Quelques jours plus tard, on découvrait que le gouvernement voulait profiter d’une loi sur les transports pour prolonger « l’expérimentation » de la VSA – qui devait finir en mars 2025 – jusqu’en décembre 2027. Deux ans et demi de plus, hop. Circulez, c’est la loi Transports.

Nous avons aussitôt publié un coup de gueule pour dénoncer le foutage de ladite gueule. La loi Jeux Olympiques prévoyait un déroulement très strict de « l’expérimentation » de la VSA, avec des bornes dans l’espace et dans le temps, un comité de pilotage pour l’encadrer, et un comité d’évaluation pour juger de son efficacité. Le gouvernement veut déjà aller plus loin, sans attendre le rapport d’évaluation et sans attendre la fin du processus écrit noir sur blanc dans la loi. Ces lois qui empêchent de faire ce qu’on veut, c’est vraiment pénible… Mais on sait le peu de cas que fait Monsieur Retailleau de l’état du droit.

Ironie du sort ou coïncidence merveilleuse : le jour-même où nous avons publié cet article coup de gueule, le rapport d’évaluation de l’expérimentation, qu’on attendait depuis des semaines et des mois, était enfin rendu public en fin de journée. Bourré d’anecdotes rigolotes (les logiciels arrivent même à prendre le trottoir pour une personne allongée), le rapport conclut globalement à une certaine inefficacité des outils et des scénarios testés. Alors, que faire ? Tester plus fort. « Plus ça rate, plus on a de chance que ça marche, ce n’est qu’en essayant continuellement que l’on finit par réussir », disaient les Shadoks, qui avaient sans doute d’excellents ministres de l’Intérieur.

Le régime de « l’expérimentation » est en effet une chose très pratique, quand on veut travailler « l’acceptabilité sociale » d’une mesure de surveillance a priori impopulaire. D’abord, elle permet de mettre en œuvre la mesure impopulaire tout en racontant qu’on ne la met pas vraiment en œuvre. Ensuite, on peut la prolonger autant de fois que nécessaire, sous prétexte d’améliorer les résultats de l’expérience. Pourquoi s’en priver ? « Tout le monde ment, tout le monde ment, le gouvernement ment énormément », chantait Massilia Sound System dans le pays qui a aussi inventé les Shadoks et la VSA « expérimentale » pendant trois ans.

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Notre article sur la prolongation : VSA jusqu’en 2027 : quand le gouvernement ose tout

Coalition Hiatus : penser l’IA et résister à l’IA

Vous le savez sans doute, parce que l’événement a saturé les médias pendant deux jours : un « Sommet de l’IA » s’est tenu à Paris les 10 et 11 février derniers, sous la présidence d’Emmanuel Macron, qui a pu annoncer triomphalement à l’issue du barnum que 109 milliards d’euros de financements privés (en grande majorité) et publics (un peu) seraient consacrés au développement de l’IA en France, d’abord pour la construction de nouveaux centre de données démesurés. La France n’a pas de gaz ni de pétrole, mais elle a de l’électricité nucléaire en assez grande quantité pour pouvoir en exporter, ou pour en consacrer à des projets inutiles et à la mode.

On serait bien en peine de dire à quoi va servir toute cette capacité de calcul, ni à quoi « l’IA » va servir, ni même de quelle « IA » il s’agit. Le mot et devenu un signifiant autonome, qui renvoie dans l’imaginaire collectif aux grands LLM génératifs (Chat-GPT, MidJourney, etc.), qui sert à désigner tout et n’importe quoi, et qui pourrait dans bien des cas être remplacé par « numérique », « ordinateur » ou « informatique » sans changer le sens de la phrase. Seule certitude, le mot « IA » est devenu dans le monde entier un symbole de pouvoir et de puissance nationale, économique et géo-stratégique. L’IA est américaine, elle est chinoise, elle est russe, et elle doit nécessairement devenir européenne et surtout française (cocorIAco ?).

De fait, la démesure de moyens techniques et financiers qu’elle requiert font que l’IA, avant d’être un moyen de pouvoir, est d’abord une preuve de pouvoir. Accessible uniquement aux puissances financières et industrielles, elle servira donc d’abord les intérêts des puissances industrielles et financières. La bulle spéculative qui l’entoure s’accompagne d’une surenchère dans les façons de l’utiliser, qui vont de l’armement autonome jusqu’au matraquage publicitaire en passant par la manipulation de l’information, dans un continuum de destruction des ressources, des liens sociaux, des esprits et des démocraties. Tout cela parce qu’on peut le faire, sans jamais se demander – ni demander aux populations – si on veut le faire.

Cet emballement serait risible s’il n’était pas intimement lié à la montée du péril fasciste, plus d’actualité que jamais depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, entouré de tous les faiseurs d’IA californienne lors de sa cérémonie d’inauguration, et dont les bras droits (tendus) font la promotion des partis d’extrême-droite partout où ils le peuvent, en Grande-Bretagne et en Allemagne notamment. Le monde de « l’IA » est un objet éminemment politique, qu’il faut mettre à distance, analyser, dégonfler et expliquer. C’est pourquoi La Quadrature a signé une tribune collective contre ce « sommet de l’IA », et décidé de lancer Hiatus, une coalition de réflexion et de travail sur le monde politique et industriel de l’IA pour le pouvoir. Une initiative que nous avions annoncée comme étant le grand chantier de cette année, dans le prolongement de nos réflexions et de nos combats de toujours : pour un usage émancipateur et démocratique du numérique, contre le numérique qui asservit, domine, surveille, impose, décide et contrôle. Au travail !

Manifeste de la coalition : Lancement de la coalition Hiatus, pour résister à l’IA et son monde !
Tribune collective : L’IA telle qu’elle est développée alimente un système d’exploitation global
Article sur le sommet de l’IA : Sommet de Paris sur l’IA : accélérer, quoi qu’il en coûte

Campagne de soutien 2025

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Agenda

La Quadrature dans les médias

Coalition hiatus et contre-sommet de l’IA

Vidéosurveillance algorithmique (VSA)

Loi « Narcotrafic »

Divers


Sommet de Paris sur l’IA : accélérer, quoi qu’il en coûte

Fri, 14 Feb 2025 09:02:47 +0000 - (source)

Le sommet de Paris sur l’intelligence artificielle (IA) organisé par la France s’est tenu les 10 et 11 février 2025.  Alors que la société civile s’organise, notamment au travers de la coalition Hiatus lancée à l’initiative de La Quadrature du Net, afin de résister au déferlement de l’intelligence artificielle, l’Europe engage une fuite en avant qui, dans le contexte actuel, risque de nous précipiter vers une sorte de techno-fascisme.

Emmanuel Macron l’affirmait encore lundi en conclusion de la première journée : « On veut accélérer, on veut réduire l’écart ». Mais accélérer quoi, au juste ?

D’abord, accélérer les déploiements de l’IA dans les services publics, et partout dans la société. Les annonces dans ce domaine se sont succédées ces derniers jours : santé, armées, éducation, France Travail… Prolongeant les politiques de dématérialisation menées depuis vingt ans dans une pure logique de rationalisation des coûts, l’IA permettra d’automatiser des pans entiers de l’action publique. Pièce maîtresse de la plupart de ces partenariats, l’entreprise Mistral AI est présentée comme la garantie de la souveraineté technologique française et européenne, et ce en dépit de la présence en nombre d’acteurs étasuniens à son capital, dont des soutiens actifs de Donald Trump comme Marc Andreessen et Ben Horowitz.

Il s’agit ensuite d’accélérer les investissements. Alors que parlement français vient d’entériner le budget le plus austéritaire depuis vingt-cinq ans, les milliards d’argent public et privé pleuvent pour l’IA, en particuliers pour les data centers. François Bayrou a ainsi annoncé 400 millions d’euros de subventions pour que trente-cinq de ces bâtiments industriels sortent de terre, tandis que BPIfrance investira 10 milliards dans l’IA. Sans compter les 109 milliards de capitaux privés dont il fut beaucoup question, dont 50 milliards d’euros investis par les Émirats Arabes Unis pour un « data center géant » et 20 milliards abondés par le fonds canadien Brookfield pour un projet du même type. La puissance de calcul est désormais un actif de choix pour les spéculateurs de la tech, accueillis à bras ouvert par la France.

Peu importe que ces immenses entrepôts à serveurs fassent d’ores et déjà l’objet de contestations à travers le pays en raison des conflits d’usage qu’ils suscitent. À Marseille, leur explosion ces dernières années a par exemple conduit à remettre à plus tard l’électrification des quais où accostent les bateaux de croisières, lesquels continuent de recracher leurs fumées toxiques dans le quartier de Saint-Antoine. Mais avec Emmanuel Macron comme VRP, la France choisit d’écarter d’un revers de main ces oppositions. Elle fait de sa politique de relance du nucléaire un atout « bas carbone », quitte à passer sous silence les dangers et les immenses inconnues qui entourent ces programmes.

Une autre grande accélération est celle des politiques de dérégulation. Alors que Donald Trump s’est empressé d’annuler les quelques règles relatives à l’IA édictées par l’administration Biden, Emmanuel Macron et Ursula Von der Leyen semblent à leur tour décidés à rogner les quelques principes posés par le « AI Act » tout juste adopté par l’Union européenne. Le chef d’État français fait sien le mantra de la disruption : « Si on régule avant d’innover, on se coupera de l’innovation ». Peu importe que l’AI Act – bardé d’exceptions et s’assimilant pour l’essentiel à un système d’auto-régulation sous la coupe des industriels – ait été dénoncé par les associations. Face à l’injonction de déployer massivement l’IA dans la société, les droits humains en sont pour leurs frais. Le vice-président étasunien, le techno-réactionnaire JD Vance, n’a pas caché sa satisfaction : « Je suis content de voir qu’un parfum de dérégulation se fait sentir dans nombre de discussions », a-t-il déclaré lors de son allocution.

S’il y a bien un domaine où ces politiques de dérégulation sont particulièrement attendues, c’est celui des data centers. « J’ai bien reçu le message des investisseurs », a ainsi lancé Emmanuel Macron en promettant de « simplifier les procédures ». Une promesse déjà traduite au plan législatif, notamment avec le projet de loi relatif à la simplification de la vie économique. En cours d’examen à l’Assemblée nationale, il vise à contourner les règles locales d’urbanisme ou celles relatives à la protection de l’environnement. Quant aux demandes de la Commission nationale du débat public d’être saisie lors de la construction de ces infrastructures énergivores, elles se heurtent à la volonté de l’État d’exclure l’instance d’un nombre croissant de projets industriels. L’IA, par ailleurs imposée dans le monde du travail au mépris des règles élémentaires du dialogue social, se paie d’un déni de démocratie toujours plus assumé.

Lors du sommet, les allusions convenues en faveur d’une intelligence artificielle « humaniste » n’auront trompé personne. Les dirigeants européens prétendent tracer une alternative tout en s’engageant dans une rivalité mimétique avec la Chine et les États-Unis – un « en même temps » aux avant-goûts de techno-fascisme. Ils nous enferment ce faisant dans fuite en avant technologique complètement insoutenable sur le plan écologique, mais aussi politiquement désastreuse. Accélérer, quoi qu’il en coûte. Quitte à foncer dans le mur.


Lancement de la coalition Hiatus, pour résister à l’IA et son monde !

Fri, 07 Feb 2025 14:07:04 +0000 - (source)

Ce texte est le manifeste fondateur de « Hiatus », une coalition composée d’une diversité d’organisations de la société civile française qui entendent résister au déploiement massif et généralisé de l’intelligence artificielle (IA). À l’approche du sommet sur l’IA organisé par la France, les 10 et 11 février 2025, le lancement de Hiatus vise à dénoncer l’inféodation des politiques publiques aux intérêts de la tech, ainsi que les coûts humains et environnementaux de l’IA. Au cours des mois à venir, des actions communes seront organisées pour décliner ce manifeste sur le plan politique.

Tout concourt à ériger le déploiement massif de l’intelligence artificielle en priorité politique. Prolongeant les discours qui ont accompagné l’informatisation depuis plus d’un demi-siècle, les promesses abondent pour conférer à l’IA des vertus révolutionnaires et imposer l’idée que, moyennant la prise en compte de certains risques, elle serait nécessairement vecteur de progrès. C’est donc l’ensemble de la société qui est sommée de s’adapter pour se mettre à la page de ce nouveau mot d’ordre industriel et technocratique. Partout dans les services publics, l’IA est ainsi amenée à proliférer au prix d’une dépendance technologique accrue. Partout dans les entreprises, les managers appellent à recourir à l’IA pour « optimiser » le travail. Partout dans les foyers, au nom de la commodité et d’une course insensée à la productivité, nous sommes poussés à l’adopter.

Pourtant, sans préjuger de certaines applications spécifiques et de la possibilité qu’elles puissent effectivement répondre à l’intérêt général, comment ignorer que ces innovations ont été rendues possible par une formidable accumulation de données, de capitaux et de ressources sous l’égide des multinationales de la tech et du complexe militaro-industriel ? Que pour être menées à bien, elles requièrent notamment de multiplier la puissance des puces graphiques et des centres de données, avec une intensification de l’extraction de matières premières, de l’usage des ressources en eau et en énergie ?

Comment ne pas voir qu’en tant que paradigme industriel, l’IA a dores et déjà des conséquences désastreuses ? Qu’en pratique, elle se traduit par l’intensification de l’exploitation des travailleurs et travailleuses qui participent au développement et à la maintenance de ses infrastructures, notamment dans les pays du Sud global où elle prolonge des dynamiques néo-coloniales ? Qu’en aval, elle est le plus souvent imposée sans réelle prise en compte de ses impacts délétères sur les droits humains et l’exacerbation des discriminations telles que celles fondées sur le genre, la classe ou la race ? Que de l’agriculture aux métiers artistiques en passant par bien d’autres secteurs professionnels, elle amplifie le processus de déqualification et de dépossession vis-à-vis de l’outil de travail, tout en renforçant le contrôle managérial ? Que dans l’action publique, elle agit en symbiose avec les politiques d’austérité qui sapent la justice socio-économique ? Que la délégation croissante de fonctions sociales cruciales à des systèmes d’IA, par exemple dans le domaine de la santé ou l’éducation, risque d’avoir des conséquences anthropologiques, sanitaires et sociales majeures sur lesquelles nous n’avons aujourd’hui aucun recul ?

Or, au lieu d’affronter ces problèmes, les politiques publiques menées aujourd’hui en France et en Europe semblent essentiellement conçues pour conforter la fuite en avant de l’intelligence artificielle. C’est notamment le cas de l’AI Act adopté par l’Union européenne et présenté comme une réglementation efficace alors qu’elle cherche en réalité à promouvoir un marché en plein essor. Pour justifier cet aveuglement et faire taire les critiques, c’est l’argument de la compétition géopolitique qui est le plus souvent mobilisé. À longueur de rapports, l’IA apparaît ainsi comme le marchepied d’un nouveau cycle d’expansion capitaliste, et l’on propose d’inonder le secteur d’argent public pour permettre à l’Europe de se maintenir dans la course face aux États-Unis et à la Chine.

Ces politiques sont absurdes, puisque tout laisse à penser que le retard de l’Europe dans ce domaine ne pourra pas être rattrapé, et que cette course est donc perdue d’avance. Surtout, elles sont dangereuses dans la mesure où, loin de constituer la technologie salvatrice souvent mise en avant, l’IA accélère au contraire le désastre écologique, renforce les injustices et aggrave la concentration des pouvoirs. Elle est de plus en plus ouvertement mise au service de projets autoritaires et impérialistes. Non seulement le paradigme actuel nous enferme dans une course technologique insoutenable, mais il nous empêche aussi d’inventer des politiques émancipatrices en phase avec les enjeux écologiques.

La prolifération de l’IA a beau être présentée comme inéluctable, nous ne voulons pas nous résigner. Contre la stratégie du fait accompli, contre les multiples impensés qui imposent et légitiment son déploiement, nous exigeons une maîtrise démocratique de cette technologie et une limitation drastique de ses usages, afin de faire primer les droits humains, sociaux et environnementaux.

Premières signataires :

La Quadrature du Net, la LDH, Union syndicale Solidaires, Scientifiques en rébellion, L’Atelier Paysan, Féministes contre le cyberharcèlement, SNES-FSU, Framasoft, Agir pour l’environnement, Attac France, Syndicat de la Magistrature, Syndicat des Avocats de France, Stop Micro, Le Nuage était sous nos pieds, Génération Lumière, Halte au contrôle numérique, ritimo, Intérêt à Agir, L’Observatoire des multinationales, Sherpa, Le Mouton numérique, Lève les yeux.


VSA jusqu’en 2027 : quand le gouvernement ose tout

Fri, 07 Feb 2025 12:07:41 +0000 - (source)

Dans la famille du grand n’importe quoi, on voudrait le gouvernement Bayrou s’il vous plaît ! L’expérimentation de vidéosurveillance algorithmique (VSA) prévue par la loi sur les Jeux Olympiques était censée se terminer dans moins de deux mois. Pourtant, le gouvernement a déposé hier un amendement pour tout simplement prolonger l’expérimentation… jusqu’à la fin de l’année 2027. Le tout en s’affranchissant totalement des promesses faites ou des règles constitutionnelles.

Le déploiement de la VSA avait été autorisé par la loi sur les Jeux Olympiques en 2023 au nom de la sécurité de cet évènement. En réalité, ce texte permettait l’utilisation de cette technologie de surveillance de masse pour une durée bien plus longue et dans un périmètre bien plus large. La VSA a ainsi été déployée dès le mois d’avril 2024 et ensuite pour de nombreux évènements comme des concerts, matchs de foot ou même récemment dans la rue pour le jour de l’An à Paris. Cette « expérimentation » est censée se terminer le 31 mars prochain.

Aussi, la loi avait prévu de façon inédite la création d’un comité chargé d’évaluer la mise en œuvre de la VSA. Ses conclusions étaient présentées comme essentielles pour juger de l’utilité de cette technologie du point de vue policier, et décider ensuite d’une éventuelle pérennisation. Depuis le début, nous avons affiché notre plus grand scepticisme face à ce mécanisme d’évaluation, dont on anticipait qu’il serait instrumentalisé par le gouvernement. Surtout, l’approche consistant à se focaliser sur l’efficacité de la VSA éludait l’ensemble des dangers inhérents à cette technologie. Il n’empêche que ce comité avait le mérité d’exister. Lors des débats parlementaires, il a d’ailleurs été brandi à de multiples reprises par le gouvernement et la majorité d’alors comme la preuve de leur bonne foi et de leur respect des libertés publiques.

Qu’il est loin ce temps-là ! Déjà, il y a quelques mois, avant même que le comité ait finalisé son travail, Laurent Nunez et Michel Barnier y allaient de leur petit commentaire pour dire à quel point ils souhaitaient le prolongement de cette technologie, comme une manière de préparer les esprits. Puis, comme prévu par la loi, le comité a remis son rapport au gouvernement à la fin de l’année 2024. Si plusieurs médias y ont eu accès et s’en sont fait l’écho, ce document n’a toujours pas été rendu public [EDIT: il l’a été quelques heures après la publication de cet article]. Pourquoi une telle opacité ? Peut-être, comme le pointent Le Monde ou France Info, parce que le rapport montre de nombreuses défaillances et un manque d’efficacité de cette technologie ? À moins que cela s’explique par le fait que l’opposition populaire à la VSA monte et que, la semaine dernière, la justice a même exigé l’interdiction du recours à ce type de logiciel ?

Quoiqu’il en soit, le gouvernement veut continuer à utiliser cette technologie. Profitant du énième retour de la loi relative à la sûreté dans les transports à l’Assemblée (dont la discussion avait d’abord été interrompue par la dissolution puis par la chute du gouvernement Barnier, et dont l’initiateur, Philippe Tabarot, est depuis devenu ministre), il a fait un coup de force. Ainsi, il a déposé un hier un amendement demandant l’extension du dispositif de VSA pendant encore trois années, au prétexte que les services n’auraient pas eu assez de temps pour tester la technologie. Reformulons les choses : il a joué et il a perdu. Mais il s’en fiche, comme nous l’anticipions, le caractère « expérimental » et tout le dispositif d’évaluation n’ont été qu’un alibi commode permettant au gouvernement de faire passer la pilule. Que la VSA « marche » ou pas est au fond accessoire. Pour le gouvernement, il s’agit de l’imposer coûte que coûte.

Sur le plan juridique, la régularité de cet amendement est parfaitement douteuse : d’une part, il pourrait ne pas être recevable puisqu’il s’agit d’un cavalier législatif, qui déborde largement l’objet de la proposition de loi. D’autre part, s’il venait à être adopté, il rentrerait en contradiction avec les règles fixées par le Conseil constitutionnel en 2023. En effet, ce dernier avait jugé que toute pérennisation et tout nouvel examen par les Sages de la conformité de la VSA à la Constitution devrait se faire à la lumière des résultats de l’évaluation. Or, si l’évaluation a bien été produite, le gouvernement s’en moque complètement. Il tente de forcer la main au Parlement qui n’aura même pas le temps de se faire sa propre idée. Outre le projet politique funeste associé à la VSA, c’est là le plus parlant dans cette affaire : l’absence totale de considération pour la légalité ou le respect des engagements fait à la représentation parlementaire. Rien d’étonnant s’agissant d’un ministre de l’intérieur qui affiche clairement son mépris pour l’État de droit.

Cet amendement est tout bonnement un scandale. La VSA ne doit pas être prolongée. Elle doit être interdite. Produit d’une industrie de la sécurité avide de profit, cette surveillance de nos corps et nos comportements est le vecteur technologique d’une amplification des discriminations policières. Elle contribue à parfaire un édifice de la surveillance qui transforme l’espace public en un espace de contrôle social permanent, qui trie les « bons citoyens » et les « suspects ».

Nous appelons tous les parlementaires à voter contre cette mesure et nous invitons toutes les personnes intéressées à se mobiliser dans leur ville ou après de leur député·e, pour faire valoir leur refus radical de ces technologies.

Pour vous informer sur la VSA et vous y opposer, retrouvez notre brochure sur le sujet et d’autres ressources sur notre page de campagne. Et pour soutenir notre travail, n’hésitez pas à faire un don.


L’IA telle qu’elle est développée alimente un système d’exploitation global

Tue, 04 Feb 2025 15:18:27 +0000 - (source)

Un collectif d’ONG emmené par Amnesty International, la LDH et Féministes contre le cyberharcèlement recommande, dans une tribune au « Monde » également signée par La Quadrature du Net, de placer les droits humains et la justice environnementale au cœur de la régulation de l’intelligence artificielle.

L’intelligence artificielle (IA) connaît un développement foudroyant, et nos dirigeants ne semblent pas pressés de réfléchir aux enjeux humains, sociaux et environnementaux de ces nouvelles technologies, uniquement vues sous le prisme de la croissance, des gains de productivité et des profits. L’IA telle qu’elle est développée perpétue cependant les discriminations, aggrave les inégalités, détruit la planète et alimente un système d’exploitation global. Parce que ces constats ne figureront pas au programme officiel du Sommet mondial sur l’IA [qui se tient à Paris les 10 et 11 février], nous, organisations de la société civile, vous les rappelons ici.

Se concentrer uniquement sur d’éventuels futurs risques existentiels à venir de l’IA est un leurre : ces technologies ont déjà des effets très concrets pour les populations les plus vulnérables et les plus discriminées et portent largement atteinte aux droits humains. En s’appuyant sur des bases de données biaisées et en intégrant les préjugés de ses concepteurs, l’IA perpétue les stéréotypes, renforce les inégalités sociales et limite l’accès aux ressources et opportunités. A cela s’ajoute le fait que le déploiement de ces systèmes d’IA s’inscrit dans le contexte des structures discriminatoires et inégalitaires qui existent dans les sociétés du monde entier. Le recours à ces technologies, souvent sur fond de politiques d’austérité, amplifie les discriminations dans l’accès à la santé, à l’emploi, aux services publics ou aux prestations sociales. En témoignent les scandales ayant éclaté ces dernières années : biais sexistes et racistes des algorithmes de santé, algorithme des services de l’emploi autrichien qui refuse d’orienter les femmes vers le secteur informatique, profilage et discrimination des usagers de la Caisse nationale des allocations familiales en France, au Danemark ou aux Pays-Bas.

Or les technologies sont rarement la solution à des problèmes en réalité systémiques. Il est préférable de s’attaquer à la racine de ces problèmes plutôt que de prendre le risque d’aggraver les violations des droits humains avec des systèmes d’IA. Tandis que l’on confie de plus en plus de décisions aux algorithmes, leurs biais peuvent avoir des conséquences dramatiques sur nos vies. Les IA prédictives se substituent à la justice et à la police, risquant d’amplifier le racisme systémique. Par exemple, aux Etats-Unis, une IA calculant les risques de récidive désignait deux fois plus les accusés noirs comme étant « à haut risque » que les accusés blancs. Et quand bien même on réduirait ces biais, se concentrer sur les outils prédictifs nous empêche de penser à des réformes plus globales du système carcéral.

Menaces pour l’Etat de droit

Ces systèmes sont aussi utilisés à des fins de surveillance et d’identification dans le cadre du contrôle des frontières ou de conflits, comme Lavender, cette IA qui, en désignant des cibles terroristes, a provoqué la mort de milliers de civils gazaouis. Et bien souvent, ces technologies sont développées par les pays occidentaux, comme les outils créés par des pays européens utilisés pour surveiller la population ouïghoure en Chine.

Les systèmes d’IA générative sont également instrumentalisés à des fins de désinformation et de déstabilisation par des régimes répressifs et des acteurs privés. « Bots » utilisés pour manipuler l’information sur des questions liées à la santé, désinformation à caractère raciste durant les dernières élections européennes, deepfakes audios et vidéo mettant en scène des candidats aux élections : ces technologies sont autant de menaces pour l’Etat de droit. Les montages crédibles générés par IA sont aussi un danger pour les femmes et les enfants : 96 % de ces deepfakes sont des contenus non consentis à caractère sexuel [selon le rapport 2019 du cabinet de conseil en gestion de risques DeepTrace], massivement utilisés dans le but de nuire aux femmes et de générer des contenus pédocriminels.

Par ailleurs, ces effets s’inscrivent dans un système d’exploitation global. L’IA, et notamment l’IA générative, constitue un véritable désastre pour l’environnement. D’ici à 2027, l’IA générative nécessitera une alimentation en électricité équivalente à celle de pays comme l’Argentine ou les Pays-Bas [comme le rapporte un article du New York Times d’octobre 2023]. Les émissions de CO2 des « géants de la tech » ont augmenté de 30 à 50 % en 2024 en raison du développement fulgurant de ces technologies. Et ce sont les pays du Sud global qui sont les premiers touchés : les data centers y pullulent, et l’extraction de minerais, comme le cobalt, utilisé entre autres dans les batteries, met en péril la santé des populations, entraîne la pollution des eaux et des terres et alimente violences et conflits armés.

L’affaire de toutes et tous

Les inégalités entre les pays du Nord et du Sud sont également aggravées par les technologies déployées pour la modération de contenus en ligne. Les géants du numérique qui allouent plus de moyens aux pays du Nord privilégient ainsi certaines langues et récits culturels, déjà dominants, au détriment des autres. Enfin, n’oublions pas que ces systèmes d’IA sont majoritairement entraînés par des travailleurs et travailleuses du Sud global, exploités et sous-payés. Selon les informations du magazine Time, la société OpenAI a ainsi rémunéré des Kényans moins de deux dollars (1,95 euro) de l’heure pour labelliser des contenus toxiques, un travail particulièrement violent et éprouvant.

Face à ces constats alarmants, le règlement européen sur l’IA, présenté comme un instrument de protection des droits et libertés, reste très imparfait, notamment sur les questions de surveillance et de police prédictive. Par ailleurs ce règlement ne s’appliquera pas hors des frontières de l’Union européenne, alors même que la menace pour les droits humains et l’environnement est globale et que l’exportation des IA de surveillance génère du profit pour les entreprises européennes.

Nos gouvernements ne cessent de parler de souveraineté de l’IA, mais les défis posés par ces systèmes transcendent les frontières. Loin d’être un sujet technologique, l’IA est l’affaire de toutes et tous. Tout le monde doit pouvoir choisir la direction de ses développements, quitte à les refuser s’ils ne correspondent pas à notre projet de société. Un cadre contraignant élaboré démocratiquement, dans une perspective de solidarité internationale et avec les communautés les plus touchées, qui place les droits humains et la justice environnementale au cœur de la régulation de l’IA, voilà le véritable progrès.


QSPTAG #317 — 31 janvier 2025

Fri, 31 Jan 2025 17:18:47 +0000 - (source)

La VSA est illégale, et c’est un tribunal qui le dit

Enfin ! Le tribunal administratif de Grenoble a tranché en notre faveur le contentieux entre La Quadrature du Net et la commune de Moirans : l’utilisation par la ville du logiciel de vidéosurveillance Briefcam est disproportionnée et illégale.

La CNIL, qui couvre complaisamment l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique (VSA) par la police et la gendarmerie, avait laissé entendre que les communes pouvaient recourir aux logiciels de VSA pour analyser les images de vidéosurveillance dans le cadre d’une enquête judiciaire. Non, disions-nous, il n’y aucun texte qui autorise l’utilisation de cette surveillance par la police. Non, dit le tribunal avec nous, ces logiciels capables de reconnaître les personnes au niveau individuel et de les suivre dans la rue sont d’un usage disproportionné, et relèvent d’un traitement de données personnelles non autorisé par la loi.

Cette décision judiciaire est évidemment très importante pour la suite : les nombreuses communes qui utilisent Briefcam ou d’autres logiciels de VSA sont bel et bien dans l’illégalité. Elle permettra aux habitantes des nombreuses municipalités concernées de faire valoir leurs droits.
Cette victoire contre la VSA sera dignement fêtée lors du Dernier Quadrapéro du Monde le 7 février 2025.

Lire l’article : La justice confirme enfin l’illégalité de Briefcam

Proposition de loi « Narcotrafic » : nouvelle offensive de surveillance

C’est malheureusement devenu une habitude. Tout gouvernement, après avoir participé à la surenchère médiatique qui transforme chaque fait divers en preuve de la déliquescence de la société, appelle à un sursaut national et à des mesures vigoureuses pour sauver le pays du chaos. On vote une loi sécuritaire qui limite les droits et les libertés publiques, la société civile gueule, les pires mesures sont censurées, une bonne partie passe quand même, et on recommence six mois plus tard pour pousser le bouchon encore un peu plus loin. C’est le cas cette fois-ci avec la nouvelle loi contre le « narcotrafic » portée par le dernier ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau (LR).

Cette proposition de loi est aujourd’hui en discussion au Sénat. Les articles du texte et les amendements des sénateurs rivalisent d’inventivité pour mieux surveiller tout et tout le monde, dans l’idée cette fois de lutter contre le trafic de drogues et le cortège de violences mortelles qu’il entraîne. On retrouve de vieilles marottes : affaiblir le chiffrement des communications, activer à distance les micros et les caméras des appareils connectés, censurer des pages web sans l’aval d’un juge, etc. Seule innovation : un procès-verbal secret dans lequel les magistrats pourront apprendre comment les suspects ont été surveillés, par quels moyens techniques ou humains, mais auquel les suspects eux-mêmes ne pourront pas avoir accès. Une dangereuse entorse aux droits de la défense.

Ces dispositions ont été critiquées publiquement par l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN), dont fait partie La Quadrature du Net. Les mesures ajoutées par les amendements du Sénat sont décrites dans un article de La Quadrature paru cette semaine.

Lire le texte de l’OLN : PPL Narcotrafic : les droits et libertés à nouveau victimes de l’addiction aux lois sécuritaires
Le pire des amendements du Sénat : Quand la loi « Narcotrafic » devient la loi « Roue libre »

Plaintes contre X

Le 20 janvier dernier, dans le sillage de l’initiative HelloQuitteX, nous avons fermé notre compte sur X. L’idée était en discussion depuis un moment. Nous avions déjà renoncé depuis deux ans à toute interaction sur ce réseau, en nous contentant d’y relayer nos articles et les contenus préparés pour nos interventions sur le Fediverse. Ce départ final est la suite logique d’un processus de désengagement commencé en 2019.

La Quadrature combat depuis longtemps le modèle des réseaux sociaux fermés qui retiennent les internautes dans leurs silos publicitaires géants et recentralisent le web, à l’inverse complet de son ambition de départ, spéculent sur la polarisation violente des « discussions » et l’encouragent même activement, tout en livrant la modération des échanges à un duo toxique entre des États surveillants-censeurs et des groupes privés, parfois plus riches que les États eux-mêmes, qui défient les lois européennes.

Contre ces géants toxiques, nous défendons le modèle de l’interopérabilité entre des réseaux divers, pluralistes, fédérés ou non, sans coexistence obligatoire des contraires qui livre les uns à l’hostilité des autres. Ce qui retient souvent les internautes sur un réseau social propriétaire, c’est la crainte de perdre tout un réseau de sociabilité, ou une audience pour un média ou une association. Alors on reste dans un enclos où les insultes, le harcèlement et les « raids » tiennent lieu de liberté d’expression et de débat public. Le développement de réseaux sociaux interopérables (Fediverse par exemple) offre une sortie viable de ce huis-clos étouffant. Il ne manquait qu’une solution pratique pour prévenir ses contacts et les retrouver sur les autres réseaux (portabilité des données), ce que propose HelloQuitteX.

L’annonce de notre départ de X a provoqué, sur X, une vague d’insultes en provenance des milieux identitaires, souverainistes et confusionnistes, qui prétendent que notre départ mettrait en cause leur liberté d’expression (la logique n’est pas leur point fort), avec des arguments qui circulent depuis des années à l’extrême-droite (nous recevons depuis 2008 un financement de soutien de la Open Society Foundation fondée par George Soros, à hauteur de 10% environ de notre budget annuel, ce qui fait de nous des agents de la CIA, du grand capital ou du cosmopolitisme judéo-maçonnique mondialiste, au choix ou tout ensemble). Soit la preuve par neuf qu’on avait raison de quitter X. Notre conviction, c’est que ce n’est pas sur un réseau social aussi toxique et aussi biaisé que X que se jouera la nécessaire bataille contre l’extrême droite. Vous pouvez nous suivre sur Mastodon.

Notre annonce du 20 janvier : Nous quittons Twitter
Tribune collective contre le marché publicitaire de la haine en ligne : Les contenus haineux et négatifs sont rentables pour les médias sociaux publicitaires

Le contrôle défaillant des services de renseignement

Les services de renseignement ont par définition une activité discrète. Depuis la loi Renseignement de 2015, contre laquelle La Quadrature et d’autres avaient activement milité pendant plusieurs mois, une autorité de contrôle des techniques de renseignement a cependant été créée, en particulier pour encadrer l’utilisation des moyens numériques de surveillance les plus intrusifs. Mais ses moyens sont limités, et sa proximité avec les services qu’elle est censée contrôler affaiblissent son efficacité. Convié à parler lors d’un colloque autour de ces enjeux, le 14 octobre dernier, un membre de La Quadrature du Net a pris la parole pour faire le point sur le rôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Nous publions le texte de son intervention.

Lire l’article : Les trous noirs dans le contrôle des services de renseignement

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La Quadrature dans les médias

[VSA] Briefcam à Moirans

Intelligence artificielle

Drones

Réseaux sociaux

Divers


La justice confirme enfin l’illégalité de Briefcam

Thu, 30 Jan 2025 15:20:17 +0000 - (source)

Victoire totale aujourd’hui au tribunal administratif de Grenoble ! L’affaire opposant La Quadrature du Net à la ville de Moirans, en Isère, s’achève par une décision reconnaissant l’illégalité du logiciel de vidéosurveillance algorithmique Briefcam. La justice ordonne à la commune de cesser immédiatement l’utilisation de ce logiciel.

Le logiciel de Briefcam est installé en toute opacité dans de très nombreuses communes de France. Techniquement, il permet d’appliquer des filtres algorithmiques sur les images de vidéosurveillance pour suivre ou retrouver les personnes en fonction de leur apparence, leurs vêtement, leur genre ou encore leur visage via une option de reconnaissance faciale. Depuis des années, nous dénonçons la dangerosité de cette vidéosurveillance algorithmique (VSA) qui est un outil inefficace et utilisé surtout pour le contrôle des populations dans l’espace public. En parallèle, nous rappelons constamment son illégalité manifeste et le laisser-faire des pouvoirs publics.

Ainsi, nous avons récemment critiqué la prise de position de la CNIL venue au secours de la police et la gendarmerie nationale, qui utilisaient ce logiciel depuis 2015 et 2017 sans l’avoir déclaré. La CNIL avait validé leur interprétation juridique farfelue pour sauver leur utilisation de ce logiciel dans le cadre d’enquête.

Or, dans cette affaire contre l’utilisation de Briefcam à Moirans, la CNIL était opportunément intervenue quelques semaines avant l’audience pour affirmer que Briefcam serait légal si utilisé par une commune pour répondre à des réquisitions judiciaires. La décision du tribunal administratif de Grenoble vient donc contredire frontalement cette position : il estime que le logiciel Briefcam met en œuvre un traitement de données personnelles disproportionné et qui n’est pas prévu par la loi, y compris dans le cas particulier d’enquêtes judiciaires.

Cette décision d’illégalité est une victoire sans précédent dans notre lutte contre la VSA. Les habitant·es de toute ville, à l’instar de Saint-Denis, Reims ou encore Brest qui ont choisi de mettre en place ce type de surveillance algorithmique, peuvent légitimement en demander l’arrêt immédiat. Les promoteurs politiques et économiques de la Technopolice doivent faire face à la réalité : leurs velléités de surveillance et de contrôle de la population n’ont pas leur place dans notre société. La CNIL n’a plus d’autre choix que d’admettre son erreur et sanctionner les communes qui continueraient d’utiliser de la VSA.

C’est grâce à vos dons que nous avons pu mener cette lutte jusqu’à son dénouement heureux aujourd’hui, et nous avons toujours besoin de votre aide pour continuer demain !


Quand la loi « Narcotrafic » devient la loi « Roue libre »

Wed, 29 Jan 2025 14:25:12 +0000 - (source)

Le Sénat a débuté hier la discussion en hémicycle de la proposition de loi dite « Narcotrafic », dont les mesures de surveillance et répressives nous inquiètent particulièrement, à La Quadrature comme avec les autres organisations de l’Observatoire des Libertés et du Numérique. À la lecture des amendements adoptés à ce stade, nous constatons que les sénateurs se sont manifestement senti pousser des ailes. Ils ont adopté nombre de mesures qui semblent irréelle tant elles sont dangereuses, faisant sauter autant que possible les limites de la surveillance et des pouvoirs répressifs. Voici un aperçu de ce florilège autoritaire.

Tout d’abord, les sénateurs ont signé le retour de l’activation à distance des objets connectés pour filmer et écouter les personnes à leur insu. Proposée par Eric Dupont-Moretti en 2023 dans une loi de réforme de la justice, cette mesure de surveillance avait été censurée par le Conseil constitutionnel. Cela n’empêche pas les parlementaires de réintroduire aujourd’hui dans le texte un régime quasi identique, qui présente les mêmes dangers qu’il y a deux ans. Ainsi, aussi bien les appareils fixes (voir l’amendement) que mobiles (voir l’amendement) seraient transformés en mouchards pour la poursuite de certaines infractions. C’est une poursuite du processus de légalisation des logiciels espions (comme ceux de NSO/Pegasus) là où l’urgence serait de les interdire tant ils sont dangereux pour les équilibres démocratiques et les libertés individuelles.

Ensuite, les sénateurs tentent de donner corps à l’obsession des dirigeants ces dernières années : accéder au contenu des communications chiffrées, par exemple via les applications Whatsapp, Signal ou Telegram (lire l’amendement). Et cela fait autant d’années que les organisations comme La Quadrature, les experts en cryptographie ou même l’ANSSI le répètent : non seulement cette mesure est impossible techniquement mais elle contrevient à toutes les exigences de sécurité numérique. Le chiffrement de bout-en-bout est conçu pour que les entreprises elles-mêmes n’aient pas accès aux messages. Introduire un accès, une « backdoor », affaiblirait le niveau de protection de l’ensemble des communications et cela n’est d’ailleurs prévu nulle part dans le monde. Le chiffrement est une mesure de sécurité, le casser rendrait le monde numérique vulnérable et personne n’y a intérêt. Mais pourquoi s’embarrasser de la vérité quand on peut faire du sensationnel ? Il est urgent que cette modification soit retirée du texte.

Les sénateurs ont ensuite continué leur festival en élargissant la possibilité pour les policiers de Pharos de censurer les contenus liés aux stupéfiants (voir l’amendement). Les Sénateurs ont ainsi voté un amendement du Gouvernement élargissant cette censure, jusqu’à présent « limitée » aux contenus faisant référence à la vente de drogue, pour englober les contenus concernant toutes les infractions liées au trafic de stupéfiants. Cette volonté de verrouiller Internet ne peut que mener à des abus au regard du volume de contenus concerné, et au cadre extra-judiciaire de ces censures. Comment les policiers sauront-ils faire la différence entre des mèmes ou des blagues sur la drogue ou encore des extraits de films ou de clips sortis de leur contexte ? Et surtout, en quoi le retrait de ces contenus auraient véritablement un impact sur la problématique sociale de la consommation de drogues, qui repose sur tellement d’autres facteurs ? Les décennies passent et pourtant le réflexe inutile et dangereux de censurer et verrouiller les moyens de communication ne s’est manifestement pas perdu.

Bien d’autres élargissements répressifs sont prévus, mais s’agissant des enjeux numériques les sénateurs ont aussi décidé de s’en prendre aux opérateurs en renforçant les conditions de vente des cartes SIM prépayées et en imposant de conserver pendant cinq (!) années les données personnelles des personnes les ayant achetées (voir l’amendement).

L’examen du texte n’est pas fini que le Sénat est déjà en roue libre à écraser les libertés fondamentales et les règles protectrices de la procédure pénale, galvanisé par le traitement médiatique et politique du sujet lié au trafic de drogues et les largesses consenties au Gouvernement Bayrou à l’égard de l’extrême-droite. Cela permet à la « chambre haute » de mettre en pratique ses obsessions de surveillance rabâchées depuis des années. Nous attendons avec crainte les discussions à venir sur le reste du texte et notamment concernant le « dossier coffre » qui créerait une procédure secrète pour empêcher les personnes de connaître – et donc de contester – la manière dont elles sont surveillées et les très larges élargissements des pouvoirs des services de renseignement. Surtout, il faut avoir conscience que ces modifications s’appliquent à l’ensemble du régime de criminalité organisée, qui va bien au delà des personnes impliquées dans le trafic de drogue.

Il est plus que temps que les membres des partis qui votent de telles mesures se ressaisissent et retournent dans le « champ républicain » et dans les perspectives de l’État de droit au lieu de faire la course à l’autoritarisme pour tenter d’égaler l’extrême droite et la droite extrême dans son délire sécuritaire.


PPL Narcotrafic : les droits et libertés à nouveau victimes de l’addiction aux lois sécuritaires

Tue, 28 Jan 2025 13:37:16 +0000 - (source)

Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN), Paris, le 28 janvier 2025.

Voilà des mois que nos responsables politiques font mine de faire la guerre au trafic de drogues et que les médias leur emboîtent le pas de façon sensationnaliste, en amplifiant des faits graves, des tragédies humaines ou en donnant de l’écho à des opérations « choc ». Les sénateurs Jérome Durain (PS) et Étienne Blanc (LR), en cheville avec les ministres de l’Intérieur et de la Justice, cherchent à renforcer le dispositif répressif et de surveillance, abaisser le contrôle de l’activité policière et réduire les droits de la défense au nom de la lutte contre le trafic de stupéfiants.

L’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN) souhaite alerter sur les dangers de ce texte qui, au prétexte d’une reprise en main d’une problématique sociétale pourtant loin d’être nouvelle et appelant d’autres solutions que le tout répressif – comme le rappelait récemment le Haut commissaire aux droits humains de l’ONU -, vise à introduire et renforcer des mesures dangereuses pour les libertés et dérogatoires au droit commun.

La proposition de loi « Sortir la France du piège du narcotrafic », outre qu’elle convoque l’imaginaire des cartels mexicains, vise à renforcer largement le régime juridique d’exception de la criminalité organisée. Ce dernier déroge déjà au droit commun en ce qu’il permet que soient utilisés les moyens d’enquête les plus intrusifs et attentatoires à la vie privée dès lors que la commission de l’une des infractions figurant sur une liste qui ne cesse de s’allonger, est suspectée. Elle englobe ainsi une grande partie des crimes et délits lorsqu’ils sont commis en bande organisée ou via la constitution d’une association de malfaiteurs, mais aussi toutes les infractions relevant du trafic de stupéfiants.

La notion de criminalité organisée, insérée en 2004 dans le code de procédure pénale officiellement pour cibler des réseaux mafieux, s’applique donc en réalité à de nombreuses autres situations. Aujourd’hui, elle légitime, comme la lutte contre le terrorisme avant elle, d’élargir toujours plus les mécanismes d’exception en vue d’une répression accrue, au nom d’une logique d’efficacité, mais dont l’expérience montre qu’ils sont toujours détournés de leur finalité initiale. Par exemple, la qualification d’association de malfaiteurs a pu être utilisée dans des affaires relatives à des actions militantes, comme à Bure contre l’enfouissement des déchets nucléaires. En outre, depuis une réforme de 2016, les pouvoirs d’enquêtes du parquet, non indépendant car soumis à l’autorité hiérarchique du Garde des Sceaux, ont été renforcés et élargis en matière de criminalité organisée, évinçant encore un peu plus les garanties attachées à l’intervention du juge d’instruction.

Mais surtout, ce texte prévoit de faire tomber toujours un peu plus les barrières encadrant la surveillance policière. À titre d’illustration, il propose d’élargir le champ d’utilisation des « boites noires », cette technique de renseignement qui analyse les données de toutes nos communications et données récupérées sur internet via des algorithmes au motif de « détecter » de nouveaux suspects, technique que nous dénonçons depuis sa création. Initialement prévue pour le seul champ du terrorisme, elle a récemment été étendue aux « ingérences étrangères » et serait donc désormais aussi autorisée « pour la détection des connexions susceptibles de révéler des actes de délinquance et à la criminalité organisées ».

Le texte vise en outre à étendre la durée d’autorisation de la surveillance par géolocalisation ainsi que pour l’accès à distance aux correspondances en matière de criminalité organisée, tandis que l’article 23 amorce la possibilité d’utiliser les drones dans les prisons. De plus, il permettra à la police – via le service Pharos – de censurer sur internet « tout contenu faisant la promotion de produits stupéfiants ». Cette censure administrative avait été autorisée dans un premier temps pour les contenus pédopornographiques avant d’être étendue au terrorisme. Vous avez dit effet « cliquet » ? Ce texte constitue incontestablement une étape de plus vers la surveillance de masse et l’extension des pouvoirs de contrôle sécuritaire.

Enfin, il innove avec une mesure extrêmement inquiétante : « le dossier coffre », ou « procès-verbal distinct ». Prévue à l’article 16 du texte, cette mesure a pour objectif d’empêcher les personnes poursuivies de connaître la manière dont elles ont été surveillées pendant l’enquête, afin qu’elles ne puissent pas contourner cette surveillance à l’avenir ou la contester dans le cadre de la procédure. Les sénateurs proposent ainsi tout bonnement que les procès-verbaux autorisant et détaillant les modalités de mise en œuvre de cette surveillance ne soient pas versés au dossier, autrement dit qu’ils ne puisse jamais être débattus. Les personnes poursuivies n’auraient ainsi plus aucun moyen de savoir ni de contester quand et comment elles ont été surveillées, y compris donc, en cas de potentiels abus des services d’enquête. Le législateur créerait une nouvelle forme de procédure secrète, introduisant par là une faille béante dans le respect du principe du contradictoire et par suite dans le droit pourtant fondamental à se défendre, maillon essentiel d’une justice équitable et d’une société démocratique.

Si nous ne sommes à l’évidence plus étonnés de l’affaiblissement progressif des libertés publiques au nom des discours sécuritaires, une attaque à ce point décomplexée des principes fondateurs d’une justice démocratique témoigne de la profonde perte de repères et de valeurs des actuels responsables publics. Parce que la proposition de loi relative au trafic de drogues suscite de graves inquiétudes quant à l’atteinte aux droits et libertés fondamentales, nous appelons l’ensemble des parlementaires à rejeter ce texte.

Organisations signataires membres de l’OLN : Globenet, Creis-Terminal, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), le Syndicat des Avocats de France (SAF), le Syndicat de la Magistrature (SM), La Quadrature du Net (LQDN), le CECIL.


Les contenus haineux et négatifs sont rentables pour les médias sociaux publicitaires

Mon, 20 Jan 2025 14:57:53 +0000 - (source)

Ce 20 janvier, 5 personnalités d’associations citoyennes expliquent dans cette tribune les liens, entre médias sociaux publicitaires et les contenus haineux et négatifs. Elles appellent à aller sur des réseaux sociaux sans pub, à bloquer la publicité sur internet, à financer autrement les médias et à avoir des lois protégeant les usager·éres d’internet de ces dérives.

Elon Musk sera nommé au gouvernement de Donald Trump ce 20 janvier.

Pour protester contre son investiture et ouvrir une réflexion sur l’impact politique des réseaux sociaux, un collectif a lancé HelloQuitteX. Cette communauté a pour but de donner des outils et inciter à aller vers des réseaux sociaux « plus ouverts et sains »1.

Le rachat de Twitter par Elon Musk en 2022 avait déjà allumé des inquiétudes qui sont loin d’être calmées. Celui-ci se targue désormais d’utiliser sa plateforme comme une arme au service des candidat·es qui lui plaisent : Donald Trump, ou récemment le parti d’extrême droite allemand l’AfD.

HelloQuitteX et les déclarations provocatrices d’Elon Musk marquent une étape dans la reconnaissance de ce que l’on sait depuis longtemps : les plateformes et leur architecture ont un effet sur les contenus qui s’y échangent, et donc les visions du monde de leurs utilisateur·ices.

Changer de réseau social ne sera pas suffisant : il faut changer leur modèle de financement. Car ces dérives ne sont pas uniquement liées aux personnalités d’Elon Musk, Jeff Bezos ou Mark Zuckerberg, elles sont inscrites dans l’architecture d’Internet.

La publicité est la source principale de financement des sites Internet2. Les plateformes ont donc besoin de nous connaître, le plus intimement possible. Plus elles possèdent d’informations sur nous, plus elles pourront cibler les publicités et mesurer leur efficacité, satisfaisant ainsi leurs véritables clients : les annonceurs.

Les plateformes ont mis en place une architecture de surveillance qui n’a rien à envier à celles des pires dystopies, dans le but principal de vendre plus cher leurs espaces publicitaires3.

Les réseaux sociaux ont un intérêt économique énorme à nous garder devant nos écrans, et rivalisent de techniques pour nous rendre « accros » à leurs applications, malgré les effets négatifs qu’ils entraînent4.

Mais ce n’est pas tout. Pour améliorer encore l’efficacité des publicités, ces réseaux sociaux se vantent de modifier nos émotions. Les recherches internes de Facebook ont montré que l’entreprise pouvait, en modifiant le fil d’actualités, influer sur l’humeur de ses utilisateur·ices5.

Meta propose donc aux annonceurs de cibler leurs annonces vers les moments où l’internaute se sent « mal dans sa peau » ou « en manque de reconnaissance », car ses recherches ont montré que les actes d’achat venaient pallier aux souffrances du quotidien. Meta favorise donc les contenus négatifs ou polarisants. Résultat ? « Plus les ados vont sur Instagram, plus leur bien-être général, leur confiance en soi, leur satisfaction à l’égard de la vie, leur humeur et l’image qu’ils ont de leur corps se dégradent »6. En 2016, une publication interne à Facebook montrait que « 64% des entrées dans des groupes extrémistes sont dûes à nos outils de recommandation »7. Ce n’est pas du hasard, c’est parce que c’est rentable.

Ils poussent ainsi tous les acteurs du jeu politique à aligner leur communication sur des contenus haineux et sans concessions. Les internautes sont enfermés dans des « bulles de filtres », entouré·es de contenus justifiant et radicalisant leurs opinions sans jamais les ouvrir à la contradiction8.

Le débat public et les discussions constructives entre internautes en deviennent de plus en plus difficiles, et cette sensation de différences irréconciliables se transfère vers les discussions en chair et en os9. Le discours de haine n’est pas qu’une abstraction numérique, il peut attiser la violence, miner la cohésion sociale, et causer des blessures profondes qui vont bien au delà des écrans, comme de nombreux rapports d’associations et institutions l’attestent10.

Ces contenus viennent nourrir des « visions du monde »11 basées sur la peur et une sensation d’envahissement, venant ainsi conforter encore les tenants du « Grand Remplacement » et autres arguments portés par les mouvements d’extrême-droite.

Quitter X pour aller sur un autre réseau social publicitaire comme BlueSky ne réglera donc pas le problème. Petit à petit, les pressions financières le porteront à modifier ses contenus vers plus de publicité12, et donc une emprise toujours plus grande de la manipulation13.

À ces effets structurels s’ajoute la guerre culturelle menée par certains grands milliardaires de la tech comme Elon Musk et récemment Mark Zuckerberg, pour imposer des idées ultra-libérales et ouvertement d’extrême droite. La concentration du secteur autour de quelques entreprises monopolistiques14 permet à ces hommes d’imposer leur vision du monde en utilisant les plateformes comme des porte-voix. Ils modèlent les règles de partage des contenus en faisant passer leur propagande pour de la liberté d’expression15.

La publicité en tant que source principale de financement des réseaux sociaux est responsable de toutes ces dérives. Pour espérer les réguler, il faut prendre en compte ce mécanisme fondamental.

C’est pourquoi nous relayons l’appel à quitter X, tout en questionnant nos pratiques des réseaux sociaux et services numériques basés sur la publicité.

Il existe de nombreuses alternatives libres efficaces comme les réseaux sociaux du Fediverse (Mastodon, Pixelfed,…), les suites de Framasoft pour les bureautiques partagés, ou PeerTube pour les vidéos.

Il est aussi particulièrement important d’installer un bloqueur de publicité, pour plus de confort de navigation et cesser de nourrir la machine à récolter les données. Le site bloquelapub.net présente des tutoriels simples.

Enfin, toutes ces mesures individuelles doivent nécessairement être complétées par des mesures contraignantes au niveau législatif. Une première étape pourrait être de rendre les réseaux sociaux responsables des contenus qui s’y échangent. Le site de La Quadrature du Net détaille les différentes lois nationales et européennes tout en donnant des pistes pour pallier aux manques16.

Il est aussi urgent de réfléchir à des modèles de financement alternatifs à la fausse gratuité publicitaire. Pour cela, nous appelons les médias et sites intéressés à prendre contact avec nous pour réfléchir ensemble à d’autres modèles possibles.

Thomas Citharel, codirecteur de Framasoft

Raquel Radaut, militante et porte-parole à La Quadrature du Net

Marie Youakim, co-présidente de Ritimo

Marie Cousin, co-présidente de Résistance à l’Agression Publicitaire

Tanguy Delaire, militant de Résistance à l’Agression Publicitaire

1Voir le manifeste de HelloQuittX https://www.helloquitx.com/MANIFESTO-HelloQuitteX.html

2Voir Shoshanna ZUBOFF, L’Âge du capitalisme de surveillance, Zulma, 2022

3Ethan ZUCKERMAN, « The Internet’s Original Sin », The Atlantic, 14 août 2014, https://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/08/advertising-is-the-internets-original-sin/376041/

4Voir à ce sujet la mini série Dopamine, diffusée sur Arte : https://www.arte.tv/fr/videos/RC-017841/dopamine/

5Selon Frances Haugen, ancienne employée de Facebook, lanceuse d’alerte, citée par David CHAVALARIAS, Toxic Data, Comment les réseaux manipulent nos opinions, Flammarion, 2022, p. 100

6Christia SPEARS BROWN, « Comment plusieurs études montrent qu’Instagram peut nuire au bien-être des jeunes », The Conversation, 26 septembre 2021 https://theconversation.com/comment-plusieurs-etudes-montrent-quinstagram-peut-nuire-au-bien-etre-des-jeunes-168514

7Mathilde SALIOU, Technoféminisme, Comment le numérique aggrave les inégalités, Éditions Grasset & Fasquelle, 2023, p. 59

8Voir l’analyse de David Chavalarias : David CHAVALARIAS, Toxic Data, op. cit.

9Tanguy DELAIRE, « Publicité sur Internet : un terrain favorable à l’extrême droite », Le Club de Mediapart, 13 novembre 2024

10 Voir par exemple  le constat d’Amnesty International ‘ https://www.amnesty.fr/actualites/sinformer-se-former-eduquer-et-agir-face-a-la-montee-des-discours-de-haine-et-anti-droits ou celui de la commission européenne https://www.coe.int/fr/web/combating-hate-speech/what-is-hate-speech-and-why-is-it-a-problem- ) ou encore ce que rapportait en juin 2024 le secrétaire général de l’ONU « L’impact négatif des discours de haine sur la paix, le développement durable, les droits de l’homme et la prévention des génocides et des crimes connexes continue d’être observé dans le monde entier » ( https://www.un.org/africarenewal/fr/magazine/juin-2024/la-jeunesse-au-service-de-la-lutte-contre-les-discours-dincitation-%C3%A0-la-haine ). »

11Voir Félicien FAURY, Des électeurs ordinaires, Enquête sur la normalisation de l’extrême droite, Éditions du Seuil, 2024

12On lit sur le site de HelloQuitteX « À noter que Bluesky a récemment fait entrer un investisseur privé, Blockchain Capital, une entreprise du monde de la blockchain et des cryptomonnaies, ce qui influencera peut-être à l’avenir son modèle économique. » https://helloquittex.com/Quitter-Twitter-X-Etape-2-Je-cree-un-compte-Mastodon-et-ou-Bluesky.html consulté le 9 janvier 2025

13Blog de Résistance à l’Agression Publicitaire, « Publicité : l’industrialisation de la manipulation », Le Club de Mediapart, 23 novembre 2021 https://blogs.mediapart.fr/resistance-agression-pub/blog/231121/publicite-lindustrialisation-de-la-manipulation

14Nikos SMYRNAIOS, « Les GAFAM, entre emprise structurelle et crise d’hégémonie », Pouvoirs, N° 185(2), 19-30, https://droit.cairn.info/revue-pouvoirs-2023-2-page-19?lang=fr

15AFP, Le Nouvel Obs, « Meta met fin à son programme de fact-checking aux Etats-Unis, Musk trouve ça « cool », Trump dit qu’il a « probablement » influencé la décision », Le Nouvel Observateur, 7 janvier 2025 https://www.nouvelobs.com/monde/20250107.OBS98735/meta-met-fin-a-son-programme-de-fact-checking-aux-etats-unis-musk-trouve-ca-cool-trump-dit-qu-il-a-probablement-influence-la-decision.html

16Voir par exemple l‘analyse du « Règlement IA » adopté par la commission européenne en mai 2024 : https://www.laquadrature.net/2024/05/22/le-reglement-ia-adopte-la-fuite-en-avant-techno-solutionniste-peut-se-poursuivre/ ou « ou les propositions en terme d’interopérabilité des réseaux sociaux : https://www.laquadrature.net/?s=interop%C3%A9rabilit%C3%A9« 


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